Le module 2 présente certains des moyens de communication disponibles dans les situations d'urgence et en cas de catastrophe. Il s'intéresse aux réseaux publics et à leurs caractéristiques, à ce que leur utilisation implique au plan opérationnel et également aux entraves possibles à leur application à différentes phases des situations d'urgence et des catastrophes.
Dans le module 1, nous avons arrêté le principe selon lequel il faut faire usage de ce qui est disponible. Pour appliquer ce principe, il nous faut examiner les besoins ainsi que les moyens. Il y a diverses manières de classer l'équipement et les réseaux de télécommunication: selon leur portée, leur technologie, leur application voire leur accessibilité financière. Leur utilité pendant différentes phases et pour les différents acteurs intervenant dans la planification préalable et l'intervention d'urgence dépend de tous ces facteurs. De nouveaux progrès technologiques ont ajouté de nouvelles dimensions même aux moyens conventionnels de communication et leur ont attribué des rôles multiples. Le traitement des informations transmises par télécommunication est devenu de plus en plus complexe. Aussi, nous faut-il tout d'abord étudier les caractéristiques des réseaux de télécommunication en place et ce n'est qu'après que nous déterminerons s'ils conviennent aux différents tâches à remplir pour la planification préalable et l'intervention dans les situations d'urgence et en cas de catastrophe.
Un réseau public est un service assuré au public par un prestataire de services. Exploiter un réseau public est une activité commerciale. Par le passé, les réseaux publics étaient le plus souvent exploités par l'Etat. Plus récemment, le monopole de l'Etat a été remplacé dans la plupart des pays par un régime de licences qui transfert la responsabilité du fonctionnement des réseaux à des entreprises privées tout en maintenant une supervision de l'Etat. L'importance des réseaux publics pour la société et le besoin d'une interopérabilité entre les réseaux aux niveaux aussi bien national qu'international appellent un contrôle général effectué par une autorité centrale d'ordinaire nationale.
L'infrastructure des réseaux publics est vulnérable. Dans de nombreux cas, les éléments centraux de plusieurs réseaux de télécommunication sont installés au même endroit de sorte qu'un incident en un seul endroit peut entraîner la perturbation simultanée de plusieurs réseaux. [exemple 2.2.a]
Les réseaux téléphoniques qui acheminent non seulement la voix, mais également divers formats de données tels que la télécopie ou les messages texte et qui permettent au public d'avoir accès aux autres réseaux tels que l'Internet sont les réseaux publics les plus étendus. Ils assurent des services de téléphonie aussi bien fixe que mobile.
Le réseau téléphonique fixe conventionnel est le premier qui vient à l'esprit lorsqu'on a besoin de transmettre un message urgent. C'est le moyen courant d'alerter des prestataires de services de secours. Les progrès technologiques ont renforcé son rôle en lui permettant de renvoyer rapidement et efficacement les appels d'urgence vers le service de secours approprié par l'intermédiaire d'un service des urgences central (que l'on atteint en composant le 911 aux Etats-Unis et le 112 dans la plupart des pays d'Europe). La possibilité que l'identité de l'appelant soit indiquée facilite l'envoi de l'aide. On peut escompter que le réseau téléphonique public restera disponible aussi longtemps que l'impact physique éventuel d'un événement n'empêche pas l'intéressé d'accéder à un téléphone ou ne perturbe pas l'infrastructure du réseau.
En dehors de son utilisation comme moyen d'alerte, le réseau téléphonique public perd rapidement de sa valeur. Dès le début d'une catastrophe, la surcharge du réseau le rendra inutilisable même lorsque l'impact physique proprement dit de l'événement n'a pas endommagé ou détruit le réseau câblé. Il est dans la nature du réseau téléphonique qu'à chaque appel plusieurs installations interviennent pour établir une liaison entre les deux points. Si un des éléments dans cette séquence tombe en panne ou est surchargé, il se produira une forte perturbation du trafic. [illustration 2.1]
Deux accessoires ou éléments de nombreuses installations téléphoniques fixes risquent d'entraver l'utilisation du système lors d'une situation d'urgence ou en cas de catastrophe:
La plupart des "téléphones sans fil" qui assurent une certaine mobilité sur une très courte distance, normalement à l'intérieur d'un bâtiment ou dans ses alentours immédiats, ne fonctionneront pas en cas de panne d'électricité: le combiné fonctionne sur batterie mais la base (reliée à la ligne téléphonique) est d'ordinaire alimentée par le secteur.
Il est courant que de nombreux bureaux soient équipés d'un autocommutateur privé ou PBX. En cas de panne de courant, les extensions de ce réseau interne ne fonctionneront plus, à moins qu'une source d'énergie électrique d'appoint ait été prévue, par exemple des accumulateurs bien entretenus et rechargés en permanence. Il faut qu'au moins un appareil téléphonique soit connecté en permanence à la ligne téléphonique fixe sans passer par un PBX et tout le monde doit en connaître l'emplacement; en cas de panne de courant locale et s'il n'y a pas perturbation du réseau téléphonique public, il sera possible en cas de besoin urgent d'accéder au réseau téléphonique public à partir d'au moins un point.
Pour surmonter les problèmes de surcharge des réseaux téléphoniques, on pourrait prévoir un statut prioritaire pour les appels urgents. Accorder cette priorité à des abonnés dont on prévoit qu'ils auront des fonctions essentielles dans des situations d'urgence est techniquement possible et ce système a en fait été parfois mis en place. Cette solution peut sembler logique mais elle présente en fait certains inconvénients:
– Nous avons constaté que les services institutionnels d'urgence ne sont pas les seuls intervenants en cas de situation d'urgence et les restrictions qu'impose un système de priorité aux abonnés non prioritaires peuvent très bien se révéler contreproductives. N'oubliez pas: La première intervention incombe à quiconque peut apporter une aide.
– Un système de priorité se doit d'être universel et d'assurer la priorité d'un appel de bout en bout. Lorsque plusieurs réseaux interviennent, comme c'est le cas dans tous les appels internationaux et même dans de nombreux appels nationaux, les règles doivent être les mêmes pour tous les opérateurs concernés. Tous les réseaux concernés doivent pouvoir reconnaître comme tel un appel prioritaire.
– Pour l'attribution d'un statut prioritaire, tous les prestataires de services doivent suivre les mêmes critères. Etant donné la dure concurrence qui existe entre les opérateurs de réseaux commerciaux, l'attribution d'une priorité peut devenir un argument de vente. L'opérateur qui applique sur ce point une politique plus généreuse attirera probablement davantage de clients que celui qui est amené à dire à ses clients potentiels qu'en cas d'urgence, ils seront rejetés du réseau.
Le réseau téléphonique mobile relève du même concept de connexion de point à point entre deux abonnés. Un téléphone mobile n'est rien d'autre qu'une extension sans fil des réseaux téléphoniques fixes. Même si l'apparition de facteurs technologiques supplémentaires tels que le recours à un mode numérique au lieu d'un mode analogique améliore les fonctions d'un téléphone mobile, celui-ci n'en fait pas moins partie du réseau téléphonique conventionnel. Nous étudierons ci‑après le type le plus courant de réseau téléphonique mobile public, le système cellulaire. [illustration 2.2]
Dans un système cellulaire, les stations de base radioélectriques assurent la liaison avec l'abonné. La portée d'une telle station, et donc les dimensions de chaque "cellule", dépend des conditions topographiques. Dans un paysage ouvert, une cellule peut avoir un rayon de plusieurs kilomètres, tandis qu'en milieu urbain dense ce rayon tombe à moins de 100 mètres. Les usagers peuvent passer d'une cellule à l'autre; les appels sont transmis automatiquement chaque fois qu'un abonné entre dans une nouvelle cellule. Chaque cellule peut traiter un nombre restreint d'appels en même temps; selon la densité d'usagers escomptée ce nombre oscille normalement entre 5 et 50. Chaque cellule a besoin non seulement d'une connexion à son point d'accès au réseau téléphonique public fixe mais également d'une alimentation en courant électrique. Selon l'emplacement de la station de base, la première connexion peut être fournie par une ligne fixe ou par une liaison hertzienne et l'alimentation électrique peut être fournie par câble ou par un moyen indépendant tel que des batteries chargées à partir de panneaux solaires. Les accords entre les opérateurs de réseaux permettent à des téléphones mobiles enregistrés dans un réseau de fonctionner également sur les réseaux d'autres opérateurs intervenant dans le même pays ou dans un autre pays. Dans des situations d'urgence, cette possibilité peut être particulièrement utile; le coût des appels effectués ou même des appels reçus dans ce type de conditions d'"itinérance" risque toutefois d'être très élevé.
Lorsqu'il existe et pour autant qu'il ne soit pas entravé par l'impact d'un événement, le service téléphonique mobile complète très utilement les communications d'urgence disponibles. Toutefois, le lourd investissement qu'implique une infrastructure hertzienne limite les services mobiles à des emplacements pour lesquels on peut escompter que la demande soit suffisamment forte pour rendre l'exploitation avantageuse. Le fait que ces services dépendent d'une infrastructure supplémentaire renforce encore la vulnérabilité des téléphones mobiles. Le nombre d'appels transmis simultanément en un endroit donné, dans le rayon d'une seule cellule, se limite de toute façon au nombre d'appels que l'opérateur du système s'attend à gérer en temps "normal". [exemple 2.2.b]
La résistance des réseaux téléphoniques cellulaires à l'impact d'une catastrophe peut souvent être supérieure à celle des réseaux fixes pour autant que les paramètres pertinents soient pris en compte au moment de l'installation du réseau. Un facteur critique est le besoin de courant électrique: les stations de base doivent être équipées de batteries d'une capacité suffisante pour garantir le fonctionnement le plus durable possible en cas de panne du réseau électrique. Chaque usager doit s'assurer que les batteries en place dans leur portable et les batteries de réserve sont chargées à tout moment afin de maintenir la communication en cas de panne de courant.
Une extension temporaire de réseaux existants ou le remplacement de réseaux endommagés est souvent possible grâce au déploiement rapide de stations de base radioélectriques mobiles dites "cellules sur roues". Selon sa taille, une cellule sur roues peut traiter simultanément un plus ou moins grand nombre d'appels. S'il n'est pas possible d'assurer localement une connexion au réseau téléphonique public, on peut même équiper une cellule sur roues de sa propre liaison, peut‑être par voie satellitaire, vers un point de connexion au réseau téléphonique public. Les opérateurs des réseaux cellulaires doivent intervenir dans l'élaboration des plans des communications d'urgence; ils ont les connaissances nécessaires et devront tenir l'équipement nécessaire prêt pour un déploiement rapide.
Pour plus de détails sur la
manière dont les systèmes cellulaires fonctionnent, consulter
<http://www.ee.washington.edu/class/498/sp98/final/marsha/final.html>,
où vous trouverez également de nombreux autres liens.
L'Alerte précoce par téléphone mobile est possible grâce à la capacité, propre au système cellulaire, d'atteindre simultanément tous les abonnés se trouvant à l'intérieur d'une ou de plusieurs cellules. Un message textuel d'"alerte cellulaire" peut être émis simultanément vers tous les téléphones mobiles connectés à une cellule, quel que soit le réseau auquel ils sont abonnés au départ. Il est prévisible que de nombreux usagers de téléphones mobiles "itinérants" se trouvent dans des endroits tels que les aéroports ou les stations touristiques. Les personnes recevant cette annonce non seulement pourront prendre les mesures voulues mais pourront alerter d'autres personnes à leur tour.
Les alertes cellulaires constituent une fonction intégrée dans la plupart des réseaux cellulaires et tous les téléphones mobiles ont la capacité de recevoir les messages. Une fois que la décision est prise de lancer une alerte, un ordinateur identifie les cellules couvrant la zone devant être alertée. Des messages correspondant à telle ou telle situation peuvent être préprogrammés et seront diffusés instantanément. Les systèmes d'alerte cellulaire sont à l'abri de toute surcharge car ils utilisent des voies de transmission de données distinctes qui existent sur tous les réseaux et ne servent pas aux communications proprement dites.
Pour plus de détails sur les possibilités qu'offrent les alertes cellulaires pour des alertes précoces et des applications du même genre consulter <http://www.ceasa-int.org>.
Le réseau téléphonique mobile par satellite n'est qu'une autre extension du réseau téléphonique conventionnel. Pour être très simples, disons que les "cellules" du réseau mobile se trouvent sur des satellites et que leur rayon d'action est beaucoup plus grand. De ce fait, les téléphones satellitaires mobiles peuvent couvrir l'ensemble du globe. Par ailleurs, alors que le nombre d'appels simultanés que chaque "cellule" peut traiter est bien entendu limité, les téléphones satellitaires évitent l'infrastructure des réseaux endommagés ou surchargés à proximité d'un événement en retransmettant les appels d'un abonné vers un centre dans une station au sol loin du lieu touché. Les caractéristiques diffèrent beaucoup selon les systèmes de téléphones satellitaires utilisés et nous devrons revenir sur cette question dans un module ultérieur du présent cours. [illustration 2.3]
La télécopie et la transmission de données sont des moyens supplémentaires qu'offrent les réseaux téléphoniques publics. L'équipement utilisé dans ces modes de transmission est par nature numérique. Convertir le contenu d'un message en signaux numériques, en impulsions, permet d'augmenter notablement le volume des informations transmises sur une liaison de télécommunication.
Le réseau téléphonique conventionnel fait appel lui à la transmission et à la réception analogiques d'ondes sonores et les avantages qu'offre la technologie numérique ne sont pas pleinement accessibles lorsque des conversions supplémentaires entre les signaux numériques et analogiques doivent être effectuées à la transmission comme à la réception. Une communication par télécopie n'est possible que si le réseau téléphonique public fonctionne; la télécopie n'est donc pas une solution de rechange lorsque le réseau téléphonique n'est plus disponible par suite d'une situation d'urgence. Il en va de même chaque fois que l'accès local à un réseau de transmission de données tel que l'Internet, est assuré par une ligne téléphonique. [exemple 2.2.c]
Les réseaux télégraphiques publics n'existent plus dans de nombreux pays. L'accès personnel aux réseaux de télécommunication étant de plus en plus facile, le besoin d'un service de télégraphe public s'est réduit au point que l'entretien de ce réseau distinct à très forte intensité de main-d'oeuvre n'est plus économiquement réalisable. Cela étant, sa disparition a entraîné la perte d'un outil de télécommunication indépendant et relativement à l'abri des surcharges. Lorsque le réseau télégraphique existe toujours, sa capacité à acheminer le trafic d'urgence ne doit pas être ignorée.
Le réseau télex public, naguère un outil essentiel du système public international de transmission des données, a subi lui aussi le même sort dans une bonne partie du monde. Sa vitesse limitée et le format également limité des messages transmis par les téléscripteurs restreignent l'utilisation de ce mode de communication à certaines applications particulières la plupart du temps sur des réseaux non publics. Une fois de plus, une solution possible de remplacement du réseau téléphonique public a été perdue, mais comme pour le service télégraphique, si un service télex reste disponible, il convient de ne pas l'ignorer lorsqu'on cherche tous les moyens disponibles pour faire face à une situation d'urgence.
L'Internet est doté d'une structure entièrement différente de celles des réseaux téléphoniques, télégraphiques ou télex. Sur l'Internet, les informations ne sont pas acheminées par un seul "canal" établi entre les terminaux de communication. La fiabilité et la résistance aux perturbations étaient les principaux objectifs que les concepteurs avaient à l'esprit lorsqu'ils ont mis au point le réseau que nous connaissons aujourd'hui sous le nom d'Internet. Pour obtenir ces caractéristiques on divise chaque message en petits morceaux appelés les "paquets" qui sont acheminés par l'intermédiaire d'ordinateurs appelés "serveurs" et "routeurs" qui recherchent automatiquement le meilleur itinéraire disponible entre les terminaux de communication. Ce faisant, le système évite également l'encombrement du moins en grande partie: une liaison téléphonique est occupée même lorsque aucun des deux abonnés ne dit rien; l'Internet lui n'achemine que les paquets contenant effectivement des informations. [illustration 2.4] [illustration 2.5]
Pour plus de détails sur la structure de l'Internet,
consulter
<http://www.cybergeography.org/atlas/atlas.html>
Les avantages de l'Internet comme réseau distinct et donc comme solution de remplacement des autres réseaux publics ne valent naturellement que pour les utilisateurs qui y ont un accès. Il s'agit essentiellement des grandes administrations, entreprises ou autres institutions. La plupart des particuliers n'ont que leur ligne téléphonique personnelle pour accéder à l'Internet ou y accèdent par l'intermédiaire du système téléphonique mobile. Dans ce cas également, les vulnérabilités de ces réseaux gêneront donc souvent l'accès du public à l'Internet. En fait, dans une connexion par accès commuté, le terminal compose le numéro de l'ordinateur qui sert de portail d'accès à l'Internet. Une certaine protection contre la surcharge ou la perturbation des éléments du réseau autres que la ligne d'abonné proprement dite est assurée par des technologies n'utilisant que la ligne téléphonique de l'abonné pour acheminer les données, depuis l'ordinateur personnel de l'utilisateur jusqu'au point d'accès à l'Internet le plus proche. Ces technologies sont entre autres les connexions DSL et ADSL; le fil ou le câble téléphonique proprement dit achemine les informations seulement jusqu'à un point d'accès proche et selon un mode qui ne perturbe pas les signaux audio analogiques normalement utilisés dans le service téléphonique. Nous devrons étudier plus en détail les technologies employées lorsque nous nous arrêterons plus avant dans le cours sur les aspects techniques des divers modes de télécommunications d'urgence.
L'Internet permet aussi la communication vocale ("Voix sur l'Internet" ou VoIP). Une liaison VoIP fonctionne comme un appel téléphonique et certains prestataires de services permettent même de se connecter au réseau téléphonique public. Le VoIP peut être utile dans des situations où le réseau téléphonique est perturbé ou surchargé pour autant que la liaison entre l'abonné et le prestataire de services continue de fonctionner. S'agissant de l'utilisation d'une liaison VoIP pour des appels d'urgence, il est cependant important de savoir que certaines fonctions du réseau téléphonique ne sont pas disponibles dans les liaisons sur l'Internet notamment l'identification de l'appelant qui donne automatiquement à ceux qui répondent aux appels d'urgence des informations sur l'origine de l'appel.
La radiomessagerie constitue un instrument de communication univoque. Elle permet de transmettre une alerte mais ne peut acheminer qu'un volume d'informations très limité. Ces caractéristiques la mettent à l'abri de toute surcharge mais limitent son application aux télécommunications d'urgence dans la phase d'alerte – la radiomessagerie permet de transmettre un "appel à l'aide" ou de diffuser une alerte mais ne peut assurer le dialogue nécessaire dans les phases ultérieures d'une opération de secours. Certains systèmes de radiomessagerie sont d'accès public; d'autres ne sont prévus que pour l'usage spécifique d'un groupe fermé de personnes.
La radiodiffusion est un autre exemple d'une communication publique univoque. Le volume des informations qu'un système de radiodiffusion peut acheminer n'est limité que par la rapidité avec laquelle les informations peuvent être obtenues et absorbées. Lors de la phase d'alerte, la radiodiffusion est un outil des plus utiles. Dans la mesure où l'équipement de réception et le courant électrique nécessaire au fonctionnement de cet équipement restent disponibles, toutes les formes de radiodiffusion conservent cette capacité même à la suite de l'impact d'une catastrophe. Les formes de radiodiffusion les plus courantes sont bien entendu la radio et la télévision, mais d'autres systèmes offrent également une capacité de radiodiffusion qui peut servir pour les télécommunications d'urgence. Nous reviendrons à une de ces possibilités lorsque nous parlerons des modes de communication dans le cadre d'un module ultérieur du présent cours.
Nous serons amenés à examiner le cadre réglementaire des télécommunications de manière plus détaillée dans le cinquième module de ce cours. S'agissant de l'utilisation des réseaux publics pour des télécommunications d'urgence, nous devons néanmoins prendre conscience dès à présent de certaines implications.
Dans tous les pays, la prestation d'un service public de télécommunication est assujettie à la réglementation des pouvoirs publics. Les réseaux publics ne sont pas placés sous le contrôle direct de leurs utilisateurs eux-mêmes. En cas d'urgence, l'utilité des réseaux de télécommunication accordant un accès direct au public est dont déterminée par les opérateurs du réseau et en dernière instance par les pouvoirs publics.
Les dépenses de télécommunication peuvent facilement devenir, en cas de catastrophe, une très lourde charge pour les organismes de secours. Même si cette question peut être considérée comme secondaire lors des opérations initiales de sauvetage, ces dépenses risquent, en quelques jours à peine, de dépasser le budget notamment celui d'organisations non gouvernementales bénévoles. Les plus grandes dépenses sont bien sûr celles encourues pour les liaisons par satellite qui font que les droits, même pour des appels courts, peuvent être prohibitifs notamment pour les communications entre deux téléphones satellitaires. Dans la plupart des systèmes, un appel de ce type est facturé comme correspondant à deux appels; pour des raisons techniques, il est acheminé de l'appelant au satellite et de là à la station au sol puis à nouveau jusqu'au satellite avant de redescendre jusqu'à l'autre téléphone satellitaire.
On a fait plusieurs tentatives pour obtenir, en cas de catastrophe, une réduction générale des droits de télécommunication au cours de la phase aigue des opérations de secours. Un traité international, la "Convention de Tampere", dont nous traiterons plus en détail dans un module ultérieur, prévoit une baisse des droits en pareille situation. A ce jour, on a surtout expliqué la non-application de l'article pertinent de ce traité international par le fait qu'il y avait une multitude d'opérateurs de réseaux et que les systèmes de facturation internationale étaient complexes.
De plus en plus, les fournisseurs de services de télécommunications publiques s'attachent à rendre leurs réseaux résistants aux catastrophes. Toutefois, il est également arrivé que lors d'une situation de catastrophe, l'accès public soit délibérément restreint. Par le passé, ces restrictions non techniques avaient deux raisons: des systèmes de priorité préétablis ne permettant la communication qu'entre des abonnés définis à l'avance, notamment les pouvoirs publics et les services de secours et la déconnexion intentionnelle de liaisons de communication en cas de crise ayant des implications politico‑militaires [exemple 2.3].
Le fait que même l'infrastructure des télécommunications dans un seul et même pays n'est pas nécessairement pleinement contrôlée par les autorités nationales accroît le risque de "perturbations administratives" des services. C'est particulièrement le cas des liaisons par satellite, car même à un appel entre un téléphone ou un terminal satellitaire et un correspondant relevant de la même juridiction nationale doit passer par un satellite et fait d'ordinaire également intervenir une station au sol dans un pays étranger. L'opérateur du réseau à satellite ou le propriétaire de l'infrastructure peut à tout moment interrompre l'accès pour telle ou telle région ou tel ou tel abonné.
A ce jour, on a relevé très peu de cas de perturbations administratives intentionnelles des services. Des restrictions, voire l'interdiction d'utiliser des téléphones et terminaux satellitaires se sont néanmoins produites dans des situations de conflit. Par rapport aux liaisons de télécommunication de Terre, les services satellitaires présentent de toute façon des vulnérabilités supplémentaires et on ne peut donc compter sur eux comme solution universelle pour les télécommunications d'urgence.
La radiodiffusion est le type de télécommunication atteignant le plus largement le public sur un réseau public. Il s'agit d'un instrument d'information publique très puissant et de nombreux pays exercent donc un strict contrôle. Dans ce contrôle interviennent couramment non seulement les autorités chargées des télécommunications, mais également les autres pouvoirs publics s'occupant de l'information publique, des médias et également de la sécurité et de la sûreté publiques.
Radiodiffuser des informations par un quelconque moyen radiophonique ou télévisuel, par des téléphones cellulaires ou même au moyen d'un haut‑parleur peut avoir un effet tout à fait massif sur le comportement des destinataires. En cas d'urgence, il est donc de la plus haute importance que les informations diffusées soient fiables. Pour ce faire, il faut établir de règles claires concernant l'autorisation des messages d'urgence. Des lignes directrices et des règles régissant la diffusion d'alertes ou d'autres avis au public doivent figurer dans tout plan de préparation aux catastrophes. Au demeurant, il peut être vital que les alertes ne soient pas retardées par le besoin d'une autorisation devant être donnée par une autorité qui pourrait, précisément dans une situation où le temps a une valeur critique, n'être pas immédiatement disponible.
Les réseaux publics sont la plupart du temps les premiers moyens de télécommunication d'urgence disponibles. Leur résistance en ce qui concerne les dommages causés à l'infrastructure et, plus particulièrement, la surcharge reste néanmoins très limitée. Ils ne relèvent pas pleinement du contrôle des usagers et sont soumis à un certain nombre d'influences extérieures éventuellement étrangères. Une fois passée la phase de sauvetage immédiate la plus aigue, leur utilisation, notamment pour ce qui est des communications internationales, peut être d'un coût prohibitif.
L'intervention en cas d'urgence exigera donc toujours le recours à des moyens de communication spécialisés supplémentaires. Ces "réseaux privés" feront l'objet du prochain module de ce cours.