Committed to connecting the world

Girls in ICT

Discours de Christian Blondin

Allocution Prononcée à l'occasion de la quatrième Conférence de Ferney "L'ONU mise en scène" (FerMun)

"Climat Mondial: Mobilisons les Juenes"

par M. Christian Blondin, directeur, l'OMM (au nom de M. Jarraud, Secrétaire général de l'OMM)
​FerMUN 2014: Cérémonie d'ouverture, 8 janvier 2014, Genève, Suisse

English

M. Michael Møller, Directeur général par intérim de l’Office des Nations Unies à Genève,
M. Touré, Secrétaire général de l’Union internationale des télécommunications,
M. Jean-Paul Brech, Proviseur du Lycée international de Ferney-Voltaire,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Mesdames, Messieurs,

C’est un plaisir pour moi d’être parmi vous aujourd’hui pour l’ouverture de cette Conférence de Ferney «L’ONU mise en scène» (FerMUN). Au nom de l'Organisation météorologique mondiale (OMM) et en mon nom propre, j’aimerais remercier l’Office des Nations Unies à Genève (ONUG), l’Union internationale des télécommunications (UIT) et le Lycée international de Ferney-Voltaire de m’avoir invité à prendre la parole sur un thème qui me tient particulièrement à cœur et qui s’intitule: «Climat mondial: mobilisons les jeunes».

Ce thème s’impose naturellement de par son caractère d’actualité. En septembre dernier, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), créé conjointement par l’OMM et le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), a publié la première partie de son cinquième Rapport d’évaluation, intitulée Les éléments scientifiques. Les conclusions de ce rapport, qui reposent sur des preuves multiples, sont sans équivoque: la température de l’atmosphère et des océans continue d’augmenter, les calottes glaciaires et les glaciers reculent inexorablement, le niveau moyen de la mer à l’échelle de la planète s’élève et l’influence de l’homme sur le système climatique est clairement établie.

Les conclusions du GIEC sont confirmées par les rapports publiés par l’OMM sur la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère et sur l’état du climat mondial. Les années les plus chaudes sont toutes postérieures à 1998 et l’année qui vient de s’achever s’inscrit dans cette tendance à long terme. Actuellement, les années les plus froides sont plus chaudes que les années les plus chaudes avant 1998.

La décennie 2001-2010 a été marquée par la plus forte fonte annuelle moyenne de la banquise arctique qui ait été constatée depuis le début des mesures par satellite, en 1979, et depuis 2007, l’étendue de cette banquise, lors du minimum saisonnier, a toujours été inférieure aux valeurs correspondantes d’avant cette date.

Le niveau moyen de la mer a augmenté à un rythme de plus de 3 mm par an depuis 1993. En moyenne, le niveau de l’océan accuse aujourd’hui une hausse de 20 cm par rapport à 1880, mais dans de nombreuses régions, cette élévation a été nettement plus marquée ou plus rapide. En conséquence, de nombreuses régions côtières, qui sont souvent les plus peuplées, sont toujours plus vulnérables face aux inondations causées par les ondes de tempête, les vagues de vent et les tsunamis. Le typhon qui a frappé les Philippines l’année dernière en est un exemple.

Les concentrations mondiales de CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère continuent d’augmenter sans relâche. Comme les scénarios du GIEC le montrent clairement, notre dépendance actuelle à l’égard des combustibles fossiles entraînera inexorablement un réchauffement de la planète; d’ici à la fin du siècle, la température moyenne pourrait atteindre 4 °C de plus qu’avant l’ère industrielle. Nous pouvons encore limiter le réchauffement à moins de 2 °C, mais pour cela, une réduction considérable et rapide des émissions de gaz à effet de serre s’impose.

Le XXIe siècle se caractérise également par la fréquence élevée de phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes de forte intensité. Comme les précipitations ont été supérieures à la normale un peu partout dans le monde, les inondations représentent le phénomène extrême le plus fréquemment observé. Un grand nombre de pays et de régions ont été frappés à un moment ou un autre par des vagues de chaleur. De graves sécheresses ont également sévi dans toutes les régions de la planète, entraînant, dans les régions les plus démunies, des pertes en vies humaines et des pénuries alimentaires à grande échelle. Les phénomènes météorologiques extrêmes contribuent aussi à aggraver les risques sanitaires, notamment lorsque l’assainissement et la gestion des eaux usées laissent à désirer.

Comme l’a dit le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon au sujet du typhon Haiyan qui a ravagé les Philippines en novembre dernier, «les phénomènes météorologiques extrêmes ne sont pas un problème hypothétique auquel nous devrons faire face un jour. Il s’agit d’un problème bien réel, […] un rappel impitoyable des graves conséquences que nous aurons à subir si nous ne changeons pas de cap».

Mesdames et messieurs,

Les jeunes du monde entier peuvent jouer un rôle de premier plan en faveur du climat. L’action pour le climat ne consiste pas uniquement à réduire les émissions de CO2 : elle concerne chacun d’entre nous et nous appelle à nous interroger sur ce que nous sommes prêts à faire pour mettre en pratique les valeurs que nous partageons.

Nombreux sont les défis et les perspectives que nous réserve l’avenir. Certains d’entre eux découleront des évolutions socio-économiques, environnementales et technologiques auxquelles nous assistons aujourd’hui. D’autres se présenteront sans signe avant-coureur ou presque. Dans la plupart des cas, le temps et le climat entreront en ligne de compte. L’évolution démographique et technologique continuera de façonner le monde dans lequel nous vivons. Ainsi, plus de la moitié de la population mondiale vit déjà en ville, d’où l’apparition de mégapoles pour lesquelles la gestion des ressources en eau et une gestion plus durable et plus rationnelle des autres ressources s’avèrent indispensables si l’on veut réduire leur vulnérabilité face aux phénomènes météorologiques extrêmes. Nos descendants seront peut-être aussi confrontés à des problèmes de ressources lorsqu’il s’agira d’assurer un accès universel à l’alimentation, à l’eau et à l’énergie.

Ce sont les jeunes des pays en développement, notamment au sein des communautés tributaires, pour leur subsistance, de l’agriculture, de la foresterie et de la pêche, qui subissent les conséquences les plus directes des changements climatiques. À lui seul, le secteur de l’agriculture représente près de la moitié de tous les emplois confondus dans les pays les moins avancés, en particulier en Afrique et en Asie. Pour de nombreux jeunes, hommes et femmes, la dégradation de l’environnement, la désertification et la réduction des rendements agricoles sont souvent synonymes d’un bouleversement majeur: la migration. En effet, les changements climatiques peuvent avoir des conséquences sur l’emploi des jeunes dans les secteurs économiques traditionnels. Mais ils peuvent également ouvrir de nouvelles perspectives, comme la création d’emplois «verts» dans différents secteurs comme ceux de l’approvisionnement énergétique, du recyclage et des transports. En d’autres termes, les jeunes peuvent ainsi contribuer directement à une croissance économique durable, ce qui permettra de ralentir la hausse du chômage de cette tranche de population et d’aider notre société à mieux s’adapter aux conséquences des changements climatiques.

Nous n’avons pas d’autre choix que de nous adapter aux changements climatiques. Pour renforcer notre capacité d’adaptation aux chocs météorologiques et climatiques, nous pouvons notamment accroître la quantité et améliorer la qualité des informations sur le temps et le climat, soit les informations nécessaires à l’action. C’est dans cette perspective que l’OMM et ses partenaires ont établi le Cadre mondial pour les services climatologiques (CMSC), mécanisme du système des Nations Unies dont l’objectif est de favoriser la production et l’exploitation d’informations et de services climatologiques à l’échelle du globe, en particulier dans les pays en développement, pour que la société soit mieux à même de relever les défis liés aux changements climatiques et de mettre à profit les nouvelles perspectives qui en découlent.

Parmi les premières activités mises en œuvre au titre du Cadre mondial, des informations relatives au climat ont été fournies à des agriculteurs africains, qui peuvent ainsi faire de meilleurs choix lorsqu’ils sélectionnent leurs cultures et programment les périodes de semis, ce qui leur permet de réduire les risques climatiques. Les informations et les alertes météorologiques transmises grâce aux téléphones portables, par exemple, peuvent sauver des vies dans les communautés de pêcheurs du lac Victoria. Les informations sur le climat sont également précieuses lorsqu’il s’agit de se prémunir contre les risques – paludisme, méningite ou vagues de chaleur– que les conditions climatiques peuvent entraîner pour la santé.

De nombreuses évolutions subiront sans doute l’influence des changements climatiques au cours de ce siècle. Les émissions de gaz à effet de serre continueront d’entraîner une hausse de la température et du niveau des mers et de modifier les régimes météorologiques et les phénomènes extrêmes à l’échelle de la  planète, mais les scientifiques ne savent pas encore sous quelle forme les régions et les pays seront touchés. Les générations actuelles et futures doivent s’attendre à un changement des conditions naturelles. Elles doivent aussi s’attendre à l’inattendu.

Pour agir dans le domaine du climat, les jeunes peuvent approfondir leurs connaissances en matière de climatologie, mieux saisir l’importance de la collaboration intergouvernementale dans ce domaine et sensibiliser le public aux problèmes liés au climat. Consciente de la grande responsabilité qu’ils endosseront à l’avenir, l’OMM a choisi de faire porter sa Journée météorologique mondiale 2014, célébrée le 23 mars, sur le thème suivant: «Temps et climat: mobilisons les jeunes». Alors que la prochaine génération devra se préparer à des changements météorologiques et climatiques, les jeunes peuvent d’ores et déjà prendre une part active à la surveillance, à la compréhension et à la prise en compte du temps et du climat d’aujourd’hui et de demain.

La communauté météorologique s'est déjà dotée d’outils pour comprendre et prévoir le temps et le climat. Dans les décennies à venir, ces outils se généraliseront. Les jeunes qui décident de faire carrière dans les domaines de la météorologie ou de la climatologie pourront jouer un rôle encore plus important. Pour les prochaines générations, les enjeux sont de taille, mais les leviers dont nous disposons pour y faire face n’ont jamais été aussi puissants.


Nous devons assumer nos responsabilités non seulement pour nous-mêmes, mais également pour les générations futures, pour nos enfants et nos petits-enfants. Vous êtes nés à la fin du XXe siècle et, la plupart d’entre vous connaîtront la seconde partie de ce siècle. Par conséquent, l’un des scénarios climatiques présentés par le GIEC sera pour vous une réalité. Lequel ? Tout dépendra des choix que nous ferons aujourd’hui.

Je vous souhaite de conduire de fructueuses négociations et d’adopter des résolutions essentielles pour l’avenir de notre planète, pour VOTRE avenir.

Je vous remercie.