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Rapport de l'enquête sur le commerce électronique effectuée dans le cadre de la Journée mondiale des télécommunications 1999
Introduction

L'an dernier, à l'occasion de la Journée mondiale des télécommunications de 1999, l'Union internationale des télécommunications a publié un document de travail intitulé "Réflexion de politique générale sur le commerce électronique", qui a été distribué à tous les Membres de l'Union. Ce document décrivait brièvement les diverses questions de politique générale soulevées par la rapide croissance des services, applications et technologies du commerce électronique, l'accent étant mis, en particulier, sur les problèmes relevant des télécommunications. Les Membres étaient ensuite invités à répondre à une série de questions concernant les initiatives et les positions relatives à un problème donné, ainsi que leurs points de vue et expériences touchant divers aspects du développement du commerce électronique.

Un grand nombre de pays Membres de l'UIT, qui représentaient largement la composition de l'Union, ont répondu à ce questionnaire (voir l'appendice pour la liste complète), fournissant des observations précieuses sur l'évolution des politiques adoptées dans le monde pour ce qui est du commerce électronique. Le présent rapport fait la synthèse de ces réponses et fait ressortir les principales tendances, et les controverses, que l'on peut observer dans le domaine des politiques de télécommunication appliquées au commerce électronique.

Le document de travail était lui-même structuré selon un modèle défini par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui distingue, dans la promotion du développement du commerce électronique, quatre axes politiques principaux: amélioration des infrastructures, instauration de la confiance, définition des règles de base, maximisation des avantages. Sous chaque catégorie, plusieurs sujets de discussions portant sur un point précis sont traités. Le présent rapport ne fournit qu'une synthèse des questions exposées dans le document de travail et reproduit l'introduction explicative de chaque catégorie. Pour chaque point particulier sur lequel les Membres de l'UIT ont été invités à répondre, nous décrivons les principaux résultats et tendances enregistrés dans le cadre de l'enquête, ainsi que quelques observations générales sur les implications possibles de ces points de vue.

Améliorer les infrastructures

Le commerce électronique est un pur produit des révolutions technologiques qui se sont produites, à la fin du XXe siècle, dans le domaine des ordinateurs et des systèmes informatiques, dans le domaine des télécommunications mais aussi dans le secteur bancaire et même au niveau des services postaux et des services de messagerie. Et ce sont précisément la progression et l'intégration des éléments d'infrastructure essentiels qui sont à la base de l'essor du commerce électronique dans le monde entier. Inversement, c'est la pénurie relative des infrastructures dans de nombreuses parties du monde en développement qui constitue le principal obstacle à l'expansion du commerce électronique dans ces régions et par là même à l'accélération de leur développement économique et social.

En conséquence, la nécessité d'améliorer (voire de créer) les éléments de l'infrastructure nationale qui conditionnent le commerce électronique est le principal sujet de préoccupation des pays en développement – le problème y est sans doute beaucoup plus pressant que dans le monde développé. Avec des taux de pénétration du service téléphonique de base inférieurs à 15% dans de nombreux pays, avec un accès encore plus réduit aux moyens informatiques et aux services de communication de données, la simple possibilité d'envisager une place sur le marché électronique mondial est encore très floue pour une bonne partie de la population du globe. Il en va de même de l'accès aux services bancaires et aux services financiers, dont les consommateurs et les petites entreprises ont un égal besoin pour opérer dans le monde numérique. La présente section traite donc de la nécessité d'améliorer les éléments d'infrastructure dans ces domaines et des moyens qui s'offrent aux pays en développement souhaitant être présents sur ce nouveau marché.

Infrastructure des techniques d'information et de communication (ICT)

Il ressort de l'enquête que, pour la grande majorité des Membres de l'UIT, il convient d'accorder un "niveau de priorité très élevé dans le cadre des objectifs de développement national" à l'accès aux infrastructures ICT et aux services de commerce électronique. C'est le point de vue de la plupart des pays les moins développés, mais même les économies les plus avancées s'accordent sur l'importance de ce point.

Par contre, le consensus n'est pas aussi général quant à savoir sur quel aspect il convient de mettre davantage l'accent en matière de développement des télécommunications. Dans la conception traditionnelle du service universel, on cherche à faire en sorte que tous les foyers disposent du service téléphonique vocal. Dans les pays qui disposent d'une infrastructure bien développée, cet objectif est déjà atteint, pour l'essentiel, et l'on s'intéresse désormais aux infrastructures évoluées, aux supports de transmission à large bande et à l'accès universel au réseau Internet.

En revanche, dans les pays en développement, les avis sont partagés quant à la question de savoir si "la fourniture aux communautés d'un accès aux services de communication et d'information les plus modernes doit avoir la priorité" sur l'objectif de service téléphonique universel: environ 35% des pays en développement "ne sont pas d'accord" avec cette proposition, et certains pays (Mexique, Grenade, par exemple) ne sont "pas du tout d'accord". Toutefois, le fait que 65% des pays en développement estiment bel et bien que l'accès aux techniques évoluées d'information et de communication est un objectif plus important que la téléphonie universelle témoigne de la rapidité de l'évolution des opinions sur cette question. Il est peut-être intéressant de noter que bon nombre des pays qui partagent le plus nettement cet avis peuvent être classés dans la catégorie des nations disposant des réseaux de communication les moins développés (Rwanda, Azerbaïdjan, Cambodge, Tanzanie notamment) et donc sont les plus éloignés du concept de service téléphonique véritablement universel. Quoi qu'il en soit, l'opinion dominante des pays en développement semble s'inscrire en faveur d'une actualisation des objectifs traditionnels de service universel en fonction des perspectives qu'offre le commerce électronique.

L'enquête avait également pour objet de faire le point des initiatives adoptées par les divers pays compte tenu de ces objectifs, et elle mettait notamment l'accent sur la mise en place de télécentres communautaires polyvalents comme stratégie d'élargissement de l'accès aux moyens d'infocommunications. Mais alors que l'on s'accorde largement sur les objectifs et les priorités, la plupart des pays qui ont répondu au questionnaire n'ont adopté – dans le meilleur des cas, que des mesures modestes pour favoriser le développement des télécentres communautaires. Moins de 20% des pays en développement disposent au moins de quelques télécentres en activité (mais un grand nombre de pays étudient les options envisageables en la matière). Plus d'un tiers n'ont aucun programme significatif en ce domaine. En revanche, la quasi totalité des pays relativement développés déploient des activités importantes dans le domaine des télécentres alors qu'ils disposent déjà d'un service téléphonique quasi universel.

Selon une autre perspective des politiques de développement des infrastructures, l'étude portait également sur le rôle de la concurrence et des investissements privés. Plus précisément, il fallait répondre à la question de savoir si la "dynamique de l'évolution" du secteur allait "accroître" la nécessité de ce type de politique orientée vers le marché dans les divers pays, et les réactions en l'occurrence ont été remarquablement uniformes: plus de 70% des personnes consultées étaient "tout à fait d'accord" et la quasi totalité étaient à tout le moins "d'accord". Il est intéressant de noter que dans un secteur encore dominé par les monopoles d'Etat il y a moins de 10 ans, en l'an 2000, une évolution accélérée vers des marchés privés, régis par les règles de la concurrence, semble susciter un écrasant consensus. La tendance a peut-être été amorcée il y a quelques années déjà, mais il est manifeste que la dynamique explosive de l'Internet et du commerce électronique l'a irrésistiblement renforcée.

Marché des télécommunications et réglementation des prix

Outre la question de l'amélioration des infrastructures des technologies de l'information, le document portait également sur les principaux problèmes de réglementation qui se posent dans le secteur des télécommunications et plus précisément au niveau de la promotion du commerce électronique. L'accent était mis, en particulier, sur la tarification et la réglementation des prix, compte tenu de l'importance que revêtent désormais les services dits évolués, liaisons de données à grand débit, services de communication directe de données aux utilisateurs finals, services d'accès au réseau Internet, pour le succès de toute entreprise de commerce électronique. Traditionnellement, ces services relativement sophistiqués sont proposés à des prix très supérieurs aux coûts de fourniture, alors que la téléphonie de base se situe au coeur du problème des subventions internes et de "l'accessibilité financière".

Les personnes consultées étaient priées de donner leur avis sur la nécessité de revoir les priorités et les méthodes traditionnelles concernant la réglementation et les tarifs, ainsi que l'approche adoptée en la matière, compte tenu de l'évolution du commerce électronique. Sur ce point, les Membres de l'UIT qui ont répondu au questionnaire sont pour ainsi dire unanimes: presque tous sont convaincus qu'il est "nécessaire de revoir les priorités et les méthodes concernant la détermination des prix des services locaux et des services nationaux de communication de données afin de faire en sorte que les services de commerce électronique soient financièrement plus abordables".

Il est intéressant de noter que sur la question des politiques de détermination des prix des circuits internationaux de communication de données, le consensus est encore plus net. Sans exception, les pays Membres de l'UIT qui ont répondu au questionnaire estiment qu'il est "nécessaire de revoir les politiques afférentes aux interconnexions internationales et à la fixation des prix afin d'élaborer des modalités de détermination des prix et des modalités de service plus équitables" pour les connexions internationales au réseau dorsal Internet. C'est notamment l'avis de l'Australie, du Canada, de la France et du Royaume-Uni. Il faut noter ici que les Etats-Unis, où réside une écrasante majorité de la capacité dorsale des fournisseurs de services, n'ont pas répondu au questionnaire.

Les questions posées portaient également, plus précisément, sur les niveaux actuels des prix des services de communication de données et des services Internet dans les divers pays. Les niveaux indiqués présentent des variations relativement importantes d'un pays à l'autre, mais on peut résumer la situation avec les fourchettes approximatives suivantes:

  • Tarification mensuelle d'un circuit local de communications de données 56 kbit/s ou équivalent:
    prix moyen: 250 dollars EU
    limite inférieure: 80 dollars EU
    limite supérieure: 500 dollars EU
  • Tarification mensuelle d'un circuit international 56 kbit/s ou équivalent, à destination des Etats-Unis:
    prix moyen: 5 000 dollars EU
    limite inférieure: 1 500 dollars EU
    limite supérieure: 10 000 dollars EU
  • Tarification mensuelle d'un abonnement d'accès à Internet pour les particuliers:
    prix moyen: 31,75 dollars EU
    limite inférieure: 4–15 dollars EU
    limite supérieure: 100 dollars EU

Services bancaires et services financiers

Le document de travail définit également les services bancaires et financiers comme des facteurs de l'infrastructure nationale tout aussi essentiels au développement du commerce électronique. Les services bancaires doivent notamment entretenir des liens étroits avec les entreprises, ainsi qu'avec les consommateurs et la communauté financière internationale aux fins de l'efficacité des opérations et de la participation de tous les usagers à l'économie numérique. Le questionnaire de l'enquête a également porté sur le développement des technologies bancaires électroniques dans les Etats Membres de l'UIT, ainsi que sur les initiatives concrètes entreprises dans ce domaine.

Comme l'on pouvait s'y attendre, les réponses ont été très variées. Certains Etats Membres déclarent être parvenus à mettre en place une infrastructure nationale complète de services financiers des plus modernes (c'est le cas de la plupart des pays développés mais également de pays tels que le Brésil, la Hongrie et la Turquie). D'autres en sont à divers stades d'une modernisation active de leur secteur bancaire, et enfin quelques-uns (Syrie, Cambodge, Tanzanie) n'en sont à ce jour qu'à l'étape de planification de la modernisation des secteurs en question.

Pour ce qui est d'étendre la portée géographique des services bancaires, en permettant notamment la réalisation d'opérations bancaires en ligne par l'intermédiaire de centres communautaires, peu d'Etats Membres font état d'initiatives en la matière. De fait, presque aucun pays ayant répondu aux questions n'a déclaré avoir parfaitement réussi à étendre ce service aux régions non desservies par des services bancaires classiques (bien que cette question ne soit pas nécessairement pertinente pour les pays les plus développés). Quant aux pays en développement qui ont répondu à cette question, 50% d'entre eux déclarent que les politiques et les projets visant à étendre les services bancaires en ligne soit ne sont pas prioritaires, soit n'en sont qu'au stade de la planification.

En fait, l'écart entre les pays les plus riches et les plus pauvres est peut-être même encore plus grand en ce qui concerne l'accès aux services financiers de pointe que dans le domaine de l'infrastructure des télécommunications publiques. D'un côté, des pays comme le Canada et le Royaume-Uni ont décrit des politiques très ambitieuses visant à mettre au point des techniques d'argent électronique et autres innovations en vue d'étendre la portée des systèmes bancaires et de les améliorer dans le cadre du développement du commerce électronique. A l'autre extrême, de nombreux pays en développement commencent à peine à utiliser des dispositifs tels que des cartes de débit (par exemple le Guyana), ou n'ont aucune politique intégrée visant à renforcer les capacités bancaires électroniques ou en ligne (par exemple le Bhoutan).

Instaurer la confiance

Parmi les principales différences que l'on peut relever entre le commerce électronique et le commerce traditionnel, il faut souligner que les opérations électroniques sont beaucoup plus impersonnelles, anonymes et automatisées que les relations entre personnes au magasin, à la banque ou même au téléphone. Cette déshumanisation des relations économiques s'accompagne d'une expansion exponentielle des moyens techniques de fraude, et des possibilités d'abus de toute sorte, aussi bien de la part des consommateurs considérés individuellement que de la part des grandes entreprises, ce qui explique la saine prudence, pour ne pas parler de la véritable méfiance, que l'on observe à de nombreux égards dans le commerce électronique.

En conséquence, pour que ces nouvelles techniques globalement impersonnelles soient plus largement acceptées, il faut que les entreprises et les institutions publiques définissent des politiques susceptibles d'instaurer davantage de confiance dans ces nouvelles formes d'activité économique. La confiance, c'est avoir en l'occurrence la conviction que les achats, les transferts de fonds, les contrats effectués par ces moyens électroniques sont tout aussi valables que les activités traditionnelles, que les données personnelles, notamment financières, resteront confidentielles, que les consommateurs seront protégés contre tout risque de fraude ou de traitement inadéquat, enfin que le monde de l'information et de la communication en ligne sera tout aussi responsable de la qualité, de la fiabilité et de la légalité des produits et services que le monde du commerce traditionnel.

En ce domaine, les questions à débattre sont étroitement liées entre elles. Les questions de sécurité et de cryptographie sont tout aussi liées à la protection de la sphère privée et aux questions d'homologation qu'aux options techniques envisageables lorsqu'il s'agit d'établir et de valider des signatures électroniques: toutes ces questions ont trait à la protection du consommateur, et il s'agit d'assurer l'intégrité des activités en ligne des entreprises et des pouvoirs publics.

Sécurité de la transmission de données

Cette question avait trait au débat sur les problèmes de sécurité qui se posent au niveau des réseaux de données et à la nécessité de protéger ces réseaux contre le vol, la fraude, les abus et même l'espionnage électronique. Les principales questions de politique, en la matière, concernaient le traitement du cryptage en droit national et en droit international. Il s'agissait de recueillir diverses opinions quant à la mesure dans laquelle les pouvoirs publics doivent avoir la possibilité de restreindre le recours au cryptage et d'avoir accès à des "clés publiques", et de savoir si les pays étaient déjà partie à des accords internationaux dans ce domaine. Les réponses obtenues sont illustrées ci-dessous:

Dans environ 42% des pays qui ont répondu au questionnaire, on estime que l'utilisation de méthodes de cryptage par les entreprises nationales dans leurs opérations électroniques ne doit être assortie d'aucune restriction. Tel est l'avis, pour l'essentiel, des pays développés, mais également du Brésil, d'El Salvador et de la Grenade. En revanche, dans 29% des pays qui ont répondu au questionnaire, l'utilisation de moyens cryptographiques est soumise à une autorisation officielle, et dans 13% de ces pays, on est favorable à la participation des pouvoirs publics sous forme de lignes directrices établies à l'intention de l'industrie.

En ce qui concerne l'accès des pouvoirs publics à des clés de décryptage des codes privés, 13% seulement des pays ayant répondu au questionnaire sont d'avis qu'aucun service public ne doit avoir un tel accès officiel. Dans près de la moitié (48%) des pays, les organismes de sécurité nationale ont accès aux clés publiques, et 35% n'accordent cet accès officiel qu'aux services de police et sur décision de justice. Dans un petit nombre de pays (16%), l'accès est donné à l'ensemble des instances chargées de faire appliquer la loi (Slovaquie, Thaïlande, Turquie, Australie, Danemark, notamment).

Un grand nombre de pays (42%) ne sont pas en mesure de se prononcer quant à la question de devenir éventuellement partie à des accords internationaux portant obligation de reconnaissance mutuelle de normes cryptographiques, mais un seul pays (la France) a explicitement déclaré son opposition à tout accord de ce type. Environ 16% des pays ayant répondu au questionnaire sont déjà partie à de tels accords internationaux et 42% envisagent de le devenir.

Protection de la confidentialité

La protection de la sphère privée de l'individu à l'ère électronique pourrait être un facteur de confiance dans le nouveau monde numérique encore plus décisif que la sécurité des opérations financières électroniques. Et pourtant, comme l'étude l'a fait apparaître, de nombreux pays ne se sont pas encore colletés avec ce problème, soit par l'intermédiaire de règles et réglementations explicites, soit par l'intermédiaire de politiques régissant l'utilisation des données personnelles par les fournisseurs de services en ligne et les propriétaires de bases de données.

Parmi les pays qui ont répondu au questionnaire, 33% ont déjà promulgué des lois efficaces concernant la protection de la sphère privée. Dans un autre groupe (30%), on a prévu des mesures de protection moins résolues, et les autres pays n'ont prévu pour ainsi dire aucun dispositif juridique ou réglementaire.

Une autre question portait sur la politique (ou la position) des pays consultés quant aux obligations auxquelles devraient être assujettis les détenteurs de bases de données électroniques ou les opérateurs de services en ligne pour ce qui est de la vente ou de la divulgation de données personnelles. Plusieurs options, progressivement plus contraignantes, étaient proposées. De nombreux pays Membres ont fait savoir que leur politique était articulée sur une combinaison de ces diverses pratiques, mais il est intéressant de noter qu'aucune option proposée n'a été isolément citée par plus de 42% des personnes ayant répondu au questionnaire. Les réponses obtenues sont illustrées ci-dessous:

Le plus souvent, l'utilisation de données personnelles est subordonnée à l'obligation d'obtenir une autorisation écrite, et les bases de données sous autorité publique doivent être officiellement enregistrées (dans les deux cas, 42% des réponses). Dans approximativement le même nombre de cas (35 à 40%), les utilisateurs doivent être notifiés des politiques afférentes à l'utilisation de données personnelles et leur accès aux informations en mémoire doit leur être garanti. Seulement 32% des pays sont favorables à l'interdiction d'exportation des bases de données contenant des données personnelles.

Pour l'heure, ces résultats ne permettent de dégager aucune tendance bien nette dans le domaine des politiques appliquées par les Etats Membres de l'UIT en matière de protection de la confidentialité. Ce domaine est relativement nouveau pour de nombreux pays, et les lois qui existent en la matière sont extrêmement récentes. Par ailleurs, en ce qui concerne l'orientation des efforts à prévoir, et leur portée, il n'y a apparemment aucun consensus suffisamment net.

Signatures numériques et contrats électroniques

Les répercussions juridiques du commerce électronique sont importantes. Le document de travail soulignait la nécessite de procéder à une refonte du droit des contrats, par exemple, compte tenu du nouvel environnement numérique. Dans ce domaine, le principal exemple d'une nouvelle approche des définitions et des normes nous est donné par la loi type de la CNUDCI sur le commerce électronique. L'étude avait pour objet de déterminer dans quelle mesure les Membres de l'UIT avaient progressé au niveau de la révision du droit national des contrats, compte tenu des nouvelles tendances du commerce électronique et des nouvelles tendances technologiques qui en découlent, et en particulier de déterminer dans quelle mesure les Membres s'inspirent de la loi type de la CNUDCI. Les résultats obtenus sont les suivants:

Dans 33 pays, une nouvelle législation des opérations électroniques a déjà été élaborée ou la refonte de la législation existante est en cours: telle est la situation, avant tout, dans les pays développés d'Europe ou du Bassin du Pacifique. Environ 36% des réponses indiquent qu'un réexamen des politiques afférentes au droit des contrats a été amorcé, tandis que, dans 18% des cas, aucun effort particulier n'a été entrepris à ce jour dans ce domaine. En ce qui concerne plus précisément la loi type de la CNUDCI, près de la moitié des pays ont répondu que leur législation – actuelle ou en gestation – s'inspirait de ce modèle, pour certains très fidèlement (17%), pour d'autres plus ou moins fidèlement (27%).

Homologation et instances d'homologation

Le document de travail mettait ensuite l'accent sur le rôle de plus en plus important des organismes d'homologation, institutions susceptibles de conférer davantage de crédibilité et de sécurité aux opérations de commerce électronique, aussi bien sur le plan national qu'à l'échelle internationale. Un grand nombre des questions pratiques qui se posent en ce qui concerne les organismes d'homologation n'ont été soulevées que très récemment, notamment la question de savoir dans quelle mesure ces organismes devraient être mandatés ou contrôlés par les pouvoirs publics, ainsi que diverses questions de juridiction transfrontières.

Dans ce domaine, les Etats Membres étaient priés de préciser dans quelle mesure, à leur avis, il était nécessaire de constituer des instances d'homologation publiques, par opposition aux initiatives de l'industrie privée. Plusieurs réponses pouvaient être apportées à cette question, qui a suscité des avis très partagés.

Instances d'homologation

16% seulement des pays se sont exprimés en faveur d'instances d'homologation constituées et exploitées par les pouvoirs publics, tandis que 25% estiment que les modalités devant être appliquées par les instances d'homologation, tout comme les conditions mêmes de leur certification, doivent être définies par les pouvoirs publics. Environ 22% estiment que les pouvoirs publics doivent définir des lignes directrices à l'intention des instances d'homologation privées, qui doivent être contrôlées par les pouvoirs publics. Enfin, 19% se sont prononcés en faveur d'une "autoréglementation de l'industrie, avec intervention des pouvoirs publics seulement en cas d'abus ou de négligence manifeste". Il est intéressant de noter que la plupart des pays favorables à l'approche de l'autoréglementation simple sont des pays à faible revenu, à moyen revenu ou à revenu intermédiaire-tranche supérieure (par exemple, Philippines, Syrie, Grenade, Nicaragua, Ouganda, Brésil), le Canada, le Danemark et la France étant les seuls pays hautement développés à prôner une telle politique.

D'une manière générale, on s'accorde à reconnaître que les instances d'homologation doivent être établies à la fois sur le plan national et sur le plan international, avis partagé par environ 72% des pays ayant répondu au questionnaire, 19% seulement estime qu'il n'y a lieu de prévoir que des instances nationales. Aucun pays n'estime que la juridiction d'homologation doit être totalement assumée par des organismes internationaux.

Quant à la situation actuelle des instances d'homologation dans les divers pays, la majorité des réponses révèlent qu'il n'y a pas de programme structuré pour l'heure. Dans seulement 17% des cas, certains organismes publics assurent des fonctions d'homologation, et 13% des réponses indiquent qu'il existe des instances d'homologation privées à l'intention desquelles les pouvoirs publics établissent des lignes directrices. Plus de 60% des Membres qui ont répondu au questionnaire ont fait savoir que certaines normes informelles définies dans le contexte d'une législation relativement floue sont appliquées par l'industrie ou même qu'il n'y a pas de programme structuré. Il est difficile de savoir dans quelle mesure ce type de politique pourrait avoir priorité dans une démarche visant à instaurer la confiance dans le commerce électronique, compte tenu des nombreux autres problèmes de droit et de politique générale que les pays doivent s'efforcer de régler.

Définir les règles de base

D'une manière générale, les usagers du commerce électronique doivent s'attendre à suivre les mêmes lois et règlements que les autres opérateurs. L'apparente nécessité de définir de nouvelles règles pour de nouveaux types de relations et d'opérations n'implique aucunement que la réglementation en place devient caduque ou doit être supprimée. En fait, selon l'une des opinions dominantes concernant les règles de base à appliquer au commerce électronique, il ne faudrait peut-être pas définir de nouvelles politiques pour les opérations en ligne ("taxation au volume" ou "droits d'entrée" sur les transmissions de données).

Néanmoins, tout comme elle modifie les relations entre consommateurs et entre entreprises, la technologie modifie le droit de regard et d'intervention des pouvoirs publics sur ces relations. La principale manifestation de cette évolution est la mondialisation du commerce qui pose un difficile problème aux gouvernements et aux institutions internationales lorsqu'il s'agit de savoir quelle est la juridiction, et donc quelles sont les règles, qu'il faut appliquer à tel ou tel type d'activité, et qui doit les appliquer. C'est dire que le succès du commerce électronique dans le monde dépendra pour beaucoup d'une harmonisation universelle de quelques politiques fondamentales, concernant par exemple la taxation et les redevances, ainsi que des modalités selon lesquelles les problèmes des droits de propriété intellectuelle et des changements de juridiction seront abordés.

Droits de propriété intellectuelle et noms de domaine

La grande facilité d'échange de toutes formes d'information sur l'Internet, qu'il s'agisse de documents ou de plans d'entreprise, encore d'oeuvres musicales et de films, pose divers problèmes de droits de propriété intellectuelle, qui sont au coeur des divers débats consacrés dans le monde entier aux politiques relatives au commerce électronique. Ces questions sont résolument abordées dans le cadre des traités internationaux et des activités des institutions internationales, plus précisément dans le cadre des traités sur les droits d'auteur élaborés par l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et dans le cadre de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC). Sur le plan intérieur, tous les pays n'ont pas adopté de mesures législatives équivalentes pour protéger les détenteurs de droits de propriété intellectuelle contre le piratage ou l'utilisation non autorisée.

L'enquête avait pour objet de déterminer le degré de protection prévu en ce domaine par les divers pays Membres. 49% des réponses indiquent une bonne protection et une application efficace des lois en vigueur, ou encore une application "raisonnable" d'une législation généralement conforme à l'accord sur les ADPIC et aux traités de l'OMPI. Dans les autres pays (51% des réponses), la législation est mal définie ou doit être actualisée pour tenir compte de l'évolution des techniques. Des pays moins développés comme la Syrie, la Tanzanie, le Burkina Faso mais aussi des pays plus avancés comme l'Australie, la France, Singapour et la Suisse font partie de ce groupe. Il apparaît que l'évolution est si rapide dans ce domaine que de nombreux pays n'ont pas encore abordé les problèmes complexes que posent les droits de propriété intellectuelle dans le contexte du commerce électronique.

Dans le domaine du commerce électronique, la question spécifique des noms de domaine Internet se pose avec une acuité toute particulière relativement à la protection des marques de commerce. Les exemples sont nombreux de piratage ou de détournement de noms connus à l'échelle internationale par des sites web illicites, et le problème est de plus en plus préoccupant alors que le réseau Internet s'étend rapidement dans le monde entier. Les problèmes peuvent être tout aussi difficiles à l'échelle d'un pays, lorsqu'une entreprise nationale cherche à étendre ses activités sur le web tout en conservant l'identité que lui confère son nom. Le document de travail abordait également ce type de problèmes associés notamment au système de noms de domaines, et les pays Membres étaient priés de spécifier s'ils disposaient d'une politique active en la matière.

Dans 28% des cas, cette politique est de la responsabilité des pouvoirs publics. Dans un autre groupe (21%), ce sont les associations de l'industrie qui s'occupent de la question, guidés par les pouvoirs publics. Mais dans près de 52% des pays qui ont répondu au Questionnaire, il n'existe pas de politique officielle en matière de noms de domaine, et les différends sont réglés au coup par coup, quand les pouvoirs publics ne s'abstiennent pas de toute participation. Manifestement, ce problème se pose encore à de nombreux pays, et son importance va vraisemblablement s'accroître.

Maximiser les avantages

Pour l'essentiel, les débats politiques et les propositions que suscite le commerce électronique procèdent du souci de supprimer les obstacles et d'ouvrir des débouchés, de telle sorte que les nouveaux types d'activité commerciale puissent connaître une expansion encore plus rapide que celle qui les caractérise déjà. Mais on peut aussi s'intéresser plus directement aux avantages directs que peut offrir le commerce électronique et plus précisément aux avantages que pourraient obtenir les pays en développement avec des stratégies efficaces.

Il apparaît que l'évolution, dans ce nouveau domaine, est stimulée essentiellement par le secteur privé, et qu'elle continuera de l'être, le rôle des pouvoirs publics consistant essentiellement à faciliter l'accès aux marchés et à ouvrir des débouchés économiques, tout particulièrement pour les petites, moyennes et microentreprises. Dans le monde en développement, les avantages du commerce électronique ne se concrétiseront pas toujours par l'accès à la concurrence mondiale ou la distribution internationale des produits et services: les gains d'efficacité et les gains de présence commerciale rendus possibles par les nouvelles technologies de l'information pourront offrir d'énormes avantages aux marchés nationaux.

Mais alors que nous nous efforçons de promouvoir la notion de maximisation des avantages offerts par le commerce électronique, il importe de savoir que certains inconvénients ne sont pas exclus. Citons par exemple l'une des principales préoccupations de l'heure, l'incidence de la nouvelle dynamique du marché sur la main d'oeuvre, la possibilité de nombreuses pertes d'emploi, soit en raison de la concurrence étrangère, soit du fait d'une évolution des modalités de l'activité économique qui se traduit tout simplement par une suppression de nombreuses activités à forte intensité de main d'oeuvre. Cette incidence peut être tout à fait inévitable, et largement compensée dans l'ensemble par la création d'emplois résultant de la croissance économique, mais les pouvoirs publics et l'industrie peuvent peut-être s'efforcer de minimiser de tels effets et de faciliter la transition pour les travailleurs et les communautés.

Développement de l'accès au marché et des débouchés économiques

Ce chapitre du document de travail aborde certaines des exigences pratiques auxquelles doivent se soumettre les entreprises qui se lancent dans une activité liée aux techniques électroniques, notamment dans les pays en développement, pour accéder au marché mondial électronique et s'y maintenir par la concurrence. Les possibilités de développement dépendent, outre des ressources financières et technologiques, de l'accès à une main-d'oeuvre qualifiée et à la formation, ainsi que de la connaissance et de l'expérience des entreprises qui, en d'autres lieux, connaissent le succès. Les pouvoirs publics et les secteurs d'activité peuvent coopérer de nombreuses façons pour promouvoir ces avantages potentiels et l'enquête a cherché à définir l'éventail des programmes et des initiatives en cours dans les Etats Membres.

Les réponses reçues citaient de nombreux programmes publics ou privés lancés pour le développement des marchés par l'intermédiaire du commerce électronique. Le graphique ci-dessous nous en donne une illustration:

Les activités le plus couramment mentionnées ont trait aux programmes nationaux d'appui et de formation pour le commerce électronique (55%) et à la mise en place de sites web pour la promotion du commerce national, du tourisme et d'autres activités en ligne (plus de 75%). Seulement 28% des pays qui ont répondu au questionnaire disposent de programmes de microfinancement ciblés sur les entreprises du nouveau secteur du commerce électronique, et il est surprenant de constater que 17% seulement des pays Membres participent à des programmes internationaux du type du réseau global des pôles commerciaux de la CNUCED (Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement) qui déploie pourtant une large gamme d'activités dans ce domaine.

Les pays Membres étaient par ailleurs priés d'indiquer les domaines d'activité économique dans lesquels l'utilisation des techniques de commerce électronique allait vraisemblablement occasionner une croissance économique significative, divers secteurs d'activité étant proposés pour les réponses. Pour la quasi-totalité des pays, le tourisme est le secteur de croissance le plus important (résultat intéressant qui donne à penser ou bien que le tourisme international doit connaître un essor général, ou bien que certains pays risquent d'être déçus par les résultats obtenus). De même, plus de 80% des pays estiment que la croissance du secteur des services financiers sera favorisée par les technologies du commerce électronique et plus de 60% des réponses mentionnent également le secteur de l'information et des loisirs ou encore celui des logiciels et de la technologie de l'information.

En revanche, on est beaucoup moins optimiste quant aux perspectives de l'artisanat et des produits locaux, largement cités pourtant comme exemples de branche d'activité dans laquelle l'Internet devrait ouvrir d'importants débouchés d'exportation. Seulement 35% des pays prévoient une croissance sensible, dans ce secteur, imputable aux technologies de l'information et de la communication (Trinité-et-Tobago, l'Ouganda, le Bhoutan et le Guyana font partie de ce groupe). De même, 38% seulement des pays s'attendent à une croissance induite par le commerce électronique dans le domaine des services juridiques et professionnels et, dans ce cas, la majorité des pays sont des pays plus avancés.

Une autre question visait à déterminer les types de services publics pouvant être proposés aux citoyens par les pouvoirs publics et articulés sur l'utilisation de technologies de communication évoluées. Ici, les pratiques ou les plans les plus courants concernent la prestation électronique des services d'enseignement public et la promotion des efforts commerciaux par des moyens électroniques (plus de 80% des réponses dans chaque cas). Seulement 37% des pays Membres envisagent des programmes de soins de santé articulés sur des moyens électroniques. De même, moins de 40% d'entre eux estiment qu'il est possible d'appliquer les technologies de communication modernes dans le domaine des services relevant "du bien-être public" ou dans le domaine électoral et politique. Lorsque davantage de pays se seront familiarisés avec l'exploitation de ce type de technologies dans le secteur privé par l'intermédiaire du commerce électronique, il sera possible de statuer quant à l'élargissement de ces applications au domaine public.

Conséquences pour la population active

Enfin, le document de travail traite de questions qui préoccupent de nombreuses organisations du mouvement syndical mondial et qui concernent l'évolution de l'activité professionnelle, et des marchés de l'emploi, résultant du développement des ICT et du commerce électronique. Le questionnaire invitait les Etats Membres à se prononcer sur l'incidence que l'expansion du commerce électronique et le développement d'une industrie utilisant les techniques de télécommunication risquent d'avoir sur le marché de l'emploi national, ainsi que sur les contre-mesures envisagées par les pouvoirs publics pour faire face à cette situation.

58% des Etats Membres ayant répondu au questionnaire s'accordent à penser que ces innovations technologiques se traduiront par "peu d'emplois perdus et beaucoup d'emplois créés dans les nouvelles industries". 31% des Etats Membres pensent que "seul un faible pourcentage des travailleurs qualifiés seront touchés d'une manière ou d'une autre". Un nombre plus restreint de pays (19%), parmi lesquels l'Autriche, le Danemark, la France, la Lettonie et la Hongrie craignent que le développement du commerce électronique puisse entraîner "davantage d'emplois perdus dans les secteurs traditionnels que d'emplois créés dans les nouvelles industries". Cela étant, aucun Etat Membre ne pense que le commerce électronique occasionnera de "fortes perturbations du marché du travail" ni aura de lourdes conséquences sur l'économie.

Dans le domaine des mesures prises pour faire face à cette situation, la majorité des pays privilégient deux principales stratégies indirectes, qui mettent l'accent sur l'éducation: assistance au recyclage des travailleurs ayant perdu leur emploi ou obligation pour les entreprises de prévoir le recyclage, et programmes généraux de formation dans les secteurs technologiques de pointe (65%). Par contre, peu de pays (moins de 10%) sont favorables à une politique interventionniste ou protectionniste telle que l'appui (subventions, etc.) direct pour soutenir les industries et les emplois traditionnels, ou l'imposition de restrictions concernant le recours à la main-d'oeuvre étrangère ou au transfert à l'étranger des activités de l'entreprise. On peut déduire de ces points de vue que presque tous les pays considèrent la mondialisation et le passage à une économie de l'information comme une évolution inévitable et que la meilleure stratégie consiste à faire en sorte d'accélérer et d'appuyer ce processus plutôt que de chercher à le limiter.

(Il convient de noter que plusieurs des Etats Membres qui ont répondu au questionnaire, et en particulier le Canada et l'Australie, ont estimé que les questions relatives à ce sujet étaient trop compliquées pour être traitées comme de simples questions à choix multiple ... Cette remarque vaut, dans une certaine mesure, pour toutes les questions qui font l'objet de cette enquête.)n

Message

Séminaire

Document de travail

Table des matière du Rapport de l'enquête sur le commerce électronique

Diffusion audio/vidéo sur Internet
(Real Video
40 Kbps)

International Herald Tribune

Commerce électronique pour les pays en développement (EC-DC)


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Dernière mise à jour: 2002-04-09