Les opérateurs de satellites contestent l’utilisation de la bande C par le
service mobile

José Albuquerque, Intelsat
UIT |
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José Albuquerque, Directeur principal,
Ingénierie du spectre, Intelsat
La Conférence mondiale des radiocommunications
(CMR-07) va examiner des questions liées à l’identification de bandes de
fréquences pour les IMT-2000 et les systèmes postérieurs aux IMT-2000. (La norme
«télécommunications mobiles internationales-2000», ou IMT-2000, est la norme
mondiale de l’UIT pour les communications hertziennes de troisième génération,
3G). Beaucoup d’opérateurs de satellites pensent que les gammes 3 400–4 200 MHz
et 4 500–4 800 MHz (appelées bande C) ne conviennent pas pour ce type
d’application.
Les gammes 3 400–4 200 MHz et 4 500–4 800 MHz figurent sur la liste des
bandes envisagées par le Secteur des radiocommunications de l’UIT (UIT–R) à la
suite des études qu’il a menées au titre du point de l’ordre du jour pertinent
de la conférence. La plupart des satellites présents dans la bande C utilisent
la première de ces gammes pour leurs transmissions sur les liaisons
descendantes. La bande 4 500–4 800 MHz est associée au Plan des liaisons
descendantes du service fixe par satellite (SFS) et est destinée à préserver des
ressources orbite/spectrale pour une utilisation future équitable par tous les
pays.
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Intelsat |
Aujourd’hui, quelque 160 satellites géostationnaires utilisent des fréquences
de la bande C pour leurs transmissions sur les liaisons descendantes (voir la
Figure 1), soit l’équivalent de plus de 3000 répéteurs de satellite ayant une
largueur de bande de 36 MHz et capables de transmettre, à tout moment, près de
180 Gbit/s. Une telle infrastructure représente un investissement de plus de
30 milliards USD pour les seuls coûts liés aux engins spatiaux et à leur
lancement et c’est sans compter les investissements dans le secteur terrien
réalisés par les utilisateurs et les opérateurs de satellites.
Figure 1 — Satellites géostationnaires actuellement en orbite,
utilisant la bande 3 400–4 200 MHz
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Le déploiement de systèmes IMT dans ces bandes réduirait considérablement les
bienfaits que ces ressources ont apportés aux utilisateurs dans le monde entier,
car le service fixe par satellite et les systèmes IMT ne peuvent pas partager
des fréquences dans une même zone géographique.
Bande C: vecteur de services fondamentaux
Les fréquences de la bande C sont utilisées pour les transmissions par
satellite sur les liaisons descendantes qui fournissent une large gamme de
services dans les pays développés ou en développement, y compris des
applications fondamentales telles que le téléenseignement, la télémédecine et
les services fournis au titre de l’accès universel; les services de raccordement
(téléphonie, Internet); les liaisons de transmission de données de microstations
(VSAT), telles que les transactions bancaires ou les réseaux d’entreprises; la
distribution de programmes de télévision; les liaisons de connexion du service
mobile par satellite et les liaisons d’urgence, y compris les services de
secours en cas de catastrophe et de prévision météorologique. Il est nécessaire,
pour ces services, de pouvoir compter sur une grande fiabilité et sur une vaste
couverture géographique, des exigences qui ne peuvent être satisfaites que dans
la bande C.
La bande C est efficace pour les petits marchés
Les faisceaux de satellite dans la bande C couvrent de larges zones
géographiques et facilitent les communications intercontinentales et mondiales.
Aux fréquences supérieures, notamment aux alentours des 12 GHz (bande Ku) ou des
20 GHz (bande Ka), les faisceaux sont plus concentrés sur des régions plus
petites afin de résister à l’affaiblissement marqué des signaux dû aux effets de
l’atmosphère. Ce phénomène est illustré par les empreintes de la liaison
descendante d’un satellite situé à 180º E, fonctionnant dans la bande C
(Figure 2) et dans la bande Ku (Figure 3).
Grâce à leur grande portée géographique, les faisceaux de la bande C offrent
une couverture financièrement viable des petits marchés et des régions à faible
densité de population. La bande C permet de couvrir une région et d’assurer une
grande disponibilité du signal, même dans les zones à fort taux de
précipitation, les fréquences qui s’y trouvent n’étant quasiment pas affectées
par les effets d’affaiblissement par la pluie. En revanche, les signaux émis
dans les bandes Ku et Ka subissent de profonds évanouissements, ce qui oblige
les opérateurs à créer des faisceaux plus étroits, visant en priorité les zones
à forte densité de population où la demande est élevée, afin de maintenir la
qualité de service exigée tout en veillant à la viabilité économique.
Cohabitation IMT/SFS impossible
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Figure 3 — Faisceau ponctuel d’un satellite situé à 180º E, fonctionnant
dans la bande Ku
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Figure 2 — Empreintes d’un satellite situé à
180º E, fonctionnant dans la bande C
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Il est impossible de faire fonctionner, dans une même bande de fréquences,
des stations terriennes de réception du SFS et des stations d’émission fixes ou
mobiles de systèmes IMT. Des études menées par l’UIT–R ont démontré qu’une
distance allant de plusieurs dizaines de kilomètres à plusieurs centaines de
kilomètres devait être maintenue entre ces dispositifs pour assurer la
protection des stations terriennes du SFS. Si l’on considère qu’une ville
moyenne s’étend sur 15 à 30 km, on ne peut raisonnablement envisager le partage
entre des systèmes IMT et des stations terriennes de réception du SFS.
De plus, les émetteurs IMT peuvent également causer des brouillages aux
stations terriennes du SFS fonctionnant dans les bandes adjacentes. Les
rayonnements non désirés produits par des émetteurs IMT affectant le signal
utile du SFS ne peuvent pas être filtrés, d’où l’existence de brouillages. En
outre, les signaux produits par un émetteur IMT peuvent être assez puissants
pour saturer l’amplificateur à faible bruit (AFB) du récepteur SFS. Compte tenu
de la différence considérable qui existe entre le niveau du signal utile
(produit par un émetteur satellite situé à environ 36 000 km) et celui du signal
brouilleur (provenant d’un émetteur IMT situé à quelques kilomètres seulement),
il paraît impossible de filtrer le signal IMT pour le ramener à un niveau
acceptable.
Les effets des brouillages dans les bandes adjacentes décrits ci-dessus
montrent clairement que l’approche visant à identifier des fréquences de la
bande C pour les systèmes IMT, en maintenant des fréquences adjacentes pour le
SFS, n’est pas dépourvue de risques de brouillage et n’est donc pas souhaitable.
Dans ce contexte, des techniques de réduction des brouillages ont été
proposées. Toutefois, compte tenu de l’ordre de grandeur des distances
nécessaires entre les dispositifs pour ramener les brouillages à des niveaux
acceptables et de l’emplacement des stations terriennes dans les zones à forte
densité, l’application desdites techniques ne peut être envisagée.
En particulier, les techniques de gestion du spectre ne sont pas réalisables
parce que le faible signal provenant du satellite ne peut pas être détecté par
l’émetteur IMT et qu’il n’est pas réaliste d’élaborer une base de données
contenant des informations sur les signaux reçus par les stations terriennes du
SFS. L’effet d’écran du terrain est également impossible pour les mêmes raisons.
Les stations terriennes concernées sont trop nombreuses et une telle solution,
même si elle pouvait être mise en œuvre, serait trop coûteuse.
Nombre de stations terriennes
Il est très difficile de faire une estimation précise du nombre de stations
terriennes dans le monde qui fonctionnent dans la bande C. Très peu de stations
en service font l’objet d’une notification individuelle à l’UIT. Les données
sont généralement incomplètes au niveau national, notamment parce que, dans la
plupart des cas, les stations terriennes destinées uniquement à la réception ne
sont pas soumises à un enregistrement obligatoire (et elles ne sont d’ailleurs
pas effectivement enregistrées) auprès des autorités des télécommunications de
chaque pays.
Figure 4 — Stations terriennes dans la bande C: représentation
incomplète du nombre de stations d’un seul opérateur de satellite
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A titre d’exemple, en août 2006, la base de données de la Commission fédérale
des communications (FCC, Federal Communications Commission) des
Etats-Unis contenait environ 6 500 stations terriennes déployées dans le pays
alors qu’on savait que plus de 11 000 stations terriennes destinées uniquement à
la réception y fonctionnaient comme têtes de réseaux câblés.
La Figure 4 donne un autre exemple. Elle présente la carte des emplacements
de stations terriennes d’un seul opérateur de satellite. Encore une fois, même
pour cet opérateur unique, la carte contient beaucoup moins de stations que le
nombre de stations effectivement déployées.
La bande C n’est pas adaptée aux systèmes IMT
Il est à noter que les fréquences de la bande C ne sont pas les mieux
adaptées aux systèmes IMT. Dans les zones à forte densité de population, le
diamètre des cellules est fonction des besoins d’utilisation. En revanche, dans
les zones à faible densité de population, le diamètre des cellules dépend de la
portée des signaux. De par les caractéristiques de la bande C, les coûts seront
considérablement plus élevés que pour un déploiement dans des bandes de
fréquences inférieures, du fait que le signal ne pénètre pas dans les bâtiments
et la perte d’énergie liée à la distance est plus grande que celle observée dans
les bandes de fréquences inférieures. Cela signifie que le déploiement des IMT
dans les zones rurales serait beaucoup plus onéreux avec la bande C.
En outre, il existe d’autres bandes pour les IMT. La Conférence
administrative mondiale des radiocommunications (CAMR) de 1992 et la Conférence
mondiale des radiocommunications de 2000 ont identifié une bande pour les
systèmes IMT, autour de 750 MHz. D’autres bandes possibles pour les IMT seront
examinées par la CMR-07, notamment au-dessous de 3 GHz.
Compte tenu de ce qui précède, les opérateurs de satellite estiment que les
bandes 3 400–4 200 MHz et 4 500–4 800 MHz (bande C) ne devraient pas être
retenues pour une utilisation par les systèmes IMT, que ce soit à l’échelle
mondiale ou à l’échelle régionale.
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