UIT/V. Martin
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La protection des enfants dans le
cyberespace
Cette année, le thème de la Journée
mondiale des télécommunications et de la société de
l'information était «la protection des enfants dans le
cyberespace». Lorsqu'il l'avait choisi lors de sa session de
novembre 2008, le Conseil de l'UIT avait attiré l'attention sur
l'importance grandissante d'un problème qui touche de plus en
plus d'enfants et d'adolescents dans le monde. Pendant le
Segment de haut niveau qui a précédé le Conseil, l'UIT a lancé
l'initiative Protection de l'enfance en ligne (COP)*,
conjointement avec des partenaires internationaux, dans le but
de créer une expérience en ligne sûre pour les enfants partout
dans le monde. Cette initiative a été entérinée par des chefs
d'Etat, des ministres et des dirigeants d'organisations
internationales du monde entier.
Initiative Protection de l'enfance en
ligne
L'initiative Protection de l'enfance en
ligne va dans le sens du mandat de l'UIT qui est d'établir les
fondements d'un Internet sûr pour les générations futures. La
nécessité de cette initiative est claire. Il y a dix ans, le
monde comptait à peine 182 millions d'internautes — et presque
tous vivaient dans le monde développé. Début 2009, on en
dénombrait plus de 1,5 milliard, dont plus de 400 millions
avaient accès au large bande.
L'Internet est une ressource commune en
plein essor — qui multiplie les possibilités mais aussi les
risques en ligne, surtout pour les enfants.
L'initiative en question cherche à
aborder la cybersécurité sous l'angle juridique, technique,
organisationnel et procédural, ainsi que sous l'angle du
renforcement des capacités et de la coopération internationale.
Ses objectifs premiers sont d'identifier les risques que courent
les enfants dans le cyberespace et d'améliorer la connaissance
des dangers, tout en développant des outils pratiques pour
réduire les risques et partager les connaissances et
l'expérience de leur application. Le site web de cette
initiative agit comme le dépositaire de liens vers de nombreuses
ressources utiles dans ce domaine.
Appel à agir
A l'occasion de la Journée mondiale des
télécommunications et de la société de l'information de cette
année, l'UIT a lancé un appel à tous les décideurs, régulateurs,
opérateurs et constructeurs du secteur des technologies de
l'information et de la communication (TIC). Elle les a appelés à
«promouvoir l'adoption de politiques et de stratégies
susceptibles de protéger les enfants dans le cyberespace et à
promouvoir leur accès en toute sécurité aux ressources en
ligne.» Cela ne conduira pas seulement à l'édification d'une
société de l'information plus inclusive, mais aidera également
les pays à s'acquitter de leurs obligations aux termes de la
Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, adoptée
en novembre 1989.
Toutes les parties prenantes, et en
particulier les Etats Membres de l'UIT, ont été appelés à:
- Familiariser le grand public à la
protection des enfants dans le cyberespace; identifier les
politiques, outils et ressources à utiliser dans leur pays
et participer aux manifestations pertinentes de l'UIT, afin
d'échanger expérience et bonnes pratiques.
- Appuyer le travail en cours visant
à élaborer des lignes directrices à l'intention des
décideurs et des régulateurs sur la protection de l'enfance
en ligne.
- Identifier les risques courus par
les enfants dans le cyberespace alors que l'Internet
continue à se développer.
- Construire des bases de ressources
à l'usage de la communauté.
- Promouvoir le renforcement des
capacités en vue de renforcer la réaction générale aux
menaces visant des enfants dans le cyberespace.
Programmes mis en place par des
partenaires
Dans le cadre de l'initiative Protection
de l'enfance en ligne, l'UIT travaille déjà avec un grand nombre
d'organisations des secteurs public et privé, qui ont divers
programmes visant à améliorer la sécurité des enfants et des
adolescents en ligne, dont les suivants ne sont que des
exemples.
INTERPOL coordonne des enquêtes policières
INTERPOL est l'organisation
internationale de police la plus importante du monde, avec 187
pays membres. Ayant son siège à Lyon (France), elle facilite la
coopération transfrontière entre forces de police et soutient
les efforts visant à prévenir la délinquance internationale et
lutter contre elle. L'un des délits les plus graves est
l'exploitation sexuelle des enfants, et l'Internet est de plus
en plus utilisé par des malfaiteurs. INTERPOL estime à 10 000 ou
20 000 le nombre d'enfants victimes d'abus sexuels et dont les
images sont visibles en ligne.
L'organisation est en mesure d'utiliser
sa position privilégiée au sein de la communauté des services
chargés de l'application du droit international pour coordonner
les enquêtes et analyser les informations et les renseignements.
Elle gère aussi la Banque d'images d'INTERPOL sur les abus dont
sont victimes les enfants (ICAID), qui est l'un des principaux
outils permettant d'aider la police à lutter contre
l'exploitation sexuelle des enfants sur l'Internet. La banque
ICAID contient plus d'un demi-million d'images, y compris des
enregistrements vidéo d'abus sexuels avec violence. Jusqu'à
présent, la base de données a permis à la police d'identifier et
de sauver près de 600 victimes de 31 pays. Elle offre aussi un
mécanisme d'alerte des autorités lorsque de nouvelles images
d'abus sexuel sont trouvées.
Initiative égyptienne Cyber Peace
Des jeunes gens aident à protéger les
enfants en ligne grâce à un programme de l'Initiative
Cyber Peace, lancée en 2007 par le Mouvement
international des femmes pour la paix Suzanne Mubarak. La
Première Dame d'Egypte a créé ce programme pour autonomiser les
jeunes de tous les pays, de manière qu'ils deviennent des
catalyseurs du changement par les TIC. A ce titre, le Groupe
égyptien pour la sécurité sur Internet (Net-Aman
en arabe) a pour but de mieux faire connaître les problèmes et
d'aider les enfants et les jeunes à identifier les contenus
nuisibles et à réagir correctement.
Le groupe est composé de membres âgés de
18 à 28 ans, et il fait des recherches pour mieux connaître les
besoins de sécurité des jeunes en Egypte, afin de tenir compte
de toutes leurs préoccupations et celles de leurs familles en ce
qui concerne l'utilisation des TIC.
Net-Aman évalue également les lignes directrices les
mieux appropriées pour les jeunes sur l'utilisation sûre de
l'Internet, et contribue à créer des ressources pédagogiques
efficaces. En outre, les membres contribuent à élargir les
programmes stratégiques et à agir comme ambassadeurs et
champions de la sécurité en ligne du point de vue des jeunes.
L'Initiative
Cyber Peace comprend aussi un groupe sur la sécurité sur
Internet pour les parents, établi en 2008. L'une de ses
premières missions a été de faire un sondage auprès des parents
en Egypte, d'où il est ressorti que seuls 30% d'entre eux savent
comment réagir si leurs enfants se trouvent confrontés à des
contenus dangereux ou inappropriés en ligne. A l'heure où les
enfants connaissent souvent l'Internet bien mieux que leurs
parents, il est indispensable que parents et enseignants
bénéficient d'une aide pour comprendre les problèmes et le rôle
qui peut être le leur pour assurer la sécurité de leurs enfants
en ligne. Le groupe sur la sécurité sur Internet pour les
parents œuvre dans ce sens, par le biais de sessions de
formation et d'ateliers, au cours desquels les parents peuvent
faire part de leurs préoccupations et demander des
renseignements sur les meilleurs moyens de garantir que les
enfants puissent profiter de l'Internet en évitant les risques
associés.
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Programme européen pour un Internet plus
sûr
L'Union européenne coordonne et appuie
les efforts visant à sécuriser l'Internet, surtout pour les
enfants. De 2009 à 2013, dans le cadre du
Programme pour un Internet
plus sûr, 55 millions d'euros seront affectés à la lutte
contre les contenus illégaux et les comportements nuisibles. Le
Programme financera des projets ayant pour but:
- de faire en sorte que les enfants,
les parents et les enseignants sachent comment être sûrs en
ligne
- de fournir aux citoyens des points
de contact nationaux pour signaler les contenus et
comportements illégaux et nocifs
- d'encourager des initiatives
d'autorégulation dans ce domaine
- d'encourager les enfants à
participer à la création d'un environnement en ligne plus
sûr
- d'établir une base de données de
connaissances sur l'utilisation des nouvelles technologies
et des risques associés, en réunissant des chercheurs dans
le domaine de la sécurité des enfants en ligne au niveau
européen.
Déjà, des «Centres Internet plus sûrs»
ont été établis dans 26 pays d'Europe, pour mettre au point des
matériels et proposer des sessions d'information à l'intention
d'enfants, de parents et d'enseignants. Ils reçoivent aussi des
rapports relatifs à des contenus illégaux trouvés sur l'Internet
et donnent des conseils sur la manière de rester en sécurité sur
la toile. Les centres ont créé des panels de jeunes qui sont
consultés sur ces questions et certains gèrent des lignes
d'assistance pour traiter des problèmes comme le
cyberharcèlement.
Le
Programme pour un Internet plus sûr finance différents
projets visant à recueillir et coordonner des données sur la
pornographie enfantine qui circule sur Internet. Il étudie aussi
les dangers de contenus inappropriés que les enfants risquent de
voir, par exemple, dans des jeux vidéo en ligne. Le projet
PEGI Online est une ramification du système
Pan European Game Information (PEGI). Lancé par la
Interactive Software Federation d'Europe en 2003 pour
aider les parents, entre autres, à prendre des décisions
davantage en connaissance de cause au sujet de ce à quoi les
enfants peuvent accéder sur l'Internet. Le système PEGI vise à
fournir des descriptions de contenu liées à l'adaptation en
fonction de l'âge. Un Code de sécurité en ligne PEGI est en
cours d'élaboration et les producteurs de jeux qui le respectent
pourront afficher un label «PEGI Online» sur la page d'accès
d'un jeu en ligne.
Telefónica donne des conseils sur l'emploi
des téléphones mobiles
L'entreprise de télécommunications
Telefónica, basée en Espagne, opère dans le monde entier
et est l'un des plus gros fournisseurs du monde de services
téléphoniques mobiles et fixes. Elle déclare «s'engager à
fournir un environnement dans lequel les enfants puissent
utiliser les nouvelles technologies en toute sécurité.» Cela est
de plus en plus important car l'utilisation de téléphones
mobiles en particulier se répand parmi les enfants — par
exemple, Telefónica dit que
la moitié environ des petits espagnols de 8 à 13 ans ont des
téléphones mobiles.
Telefónica
encourage l'utilisation responsable de ses services par les
enfants grâce à une collaboration avec les pouvoirs publics,
d'autres partenaires du secteur, les parents et les éducateurs.
Elle aide aussi les enfants à tirer le meilleur parti possible
des possibilités offertes par la technologie en proposant des
produits et des services adaptés à leurs besoins.
Telefónica Móviles España, par exemple, a lancé des
téléphones spécialement conçus pour les enfants, avec un choix
approprié de fonctions orientées vers l'éducation. Globalement,
l'entreprise applique des politiques de protection des jeunes
utilisateurs du téléphone en les empêchant de voir des contenus
réservés aux adultes. Le but est d'établir un mécanisme
approprié dans tous les secteurs d'activité de
Telefónica, offrant des modalités garanties de limitation
de l'accès des mineurs à ce type de service.
L'entreprise participe à des programmes
nationaux et internationaux de promotion de l'utilisation
responsable des téléphones mobiles, surtout lorsqu'ils donnent
accès à l'Internet. Elle communique également des directives à
la communauté, par exemple au travers de la publication «Child
protection: O2's mobile phone guide for parents», produite par
la branche britannique de
Telefónica.
UNICEF promeut un environnement protecteur
Le Fonds des Nations Unies pour
l'enfance, l'UNICEF, estime que 300 millions d'enfants dans le
monde sont victimes de violences, d'exploitation et d'abus et
que des millions d'autres ne sont pas bien protégés. Les abus
comprennent le genre de prédation pédophile en ligne qui est un
élément majeur dans le trafic d'enfants. L'UNICEF cite un
chiffre global donné par l'Organisation internationale du
travail, publié en 2005, celui de 1,39 million, victimes
d'exploitation sexuelle commerciale, dont 40 à 50% sont des
enfants. «C'est une forme moderne d'esclavage», dit l'UNICEF.
L'UNICEF préconise et appuie la création
d'un environnement protecteur pour les enfants, en partenariat
avec les pouvoirs publics, le secteur privé et la société
civile. En République sudafricaine, par exemple, l'UNICEF a
contribué à mieux faire connaître le problème de la pornographie
infantile en apportant un soutien technique et financier à une
conférence nationale sur ce sujet, conférence qui s'est tenue en
2005 et a adopté un plan d'action pour l'élimination de la
pornographie infantile. Au plan international, l'UNICEF,
l'Organisation mondiale du tourisme et l'Association ECPAT (End
Child Prostitution, Child Pornography and Trafficking of
Children for Sexual Purposes) International ont lancé
un Code de Conduite pour la Protection des Enfants contre
l'Exploitation Sexuelle dans les Voyages et le Tourisme.
Ce projet vise à faire participer le secteur du tourisme à la
lutte active contre le tourisme sexuel.
L'UIT poursuit ses travaux
Lors du Sommet mondial sur la société de
l'information (SMSI), l'UIT a été chargée par les dirigeants de
la communauté internationale de la Grande Orientation C5:
«améliorer la confiance et la sécurité dans l'utilisation des
TIC». Issu du SMSI, l'Agenda de Tunis de 2005 a reconnu le rôle
des TIC dans la protection des enfants et dans l'amélioration de
leur développement, ainsi que la nécessité de «renforcer les
mesures destinées à protéger les enfants contre tout abus et à
assurer la défense de leurs droits dans le contexte des TIC».
L'UIT va continuer ce travail important
à titre prioritaire. Pour l'avenir de la société, il est
essentiel que les enfants et les jeunes puissent profiter des
bienfaits du monde en ligne sans être victimes de ses
prédateurs.
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