1. Le problème: la confiance des utilisateurs dans
l'utilisation des TIC baisse
La transformation des sociétés en sociétés de l'information, rendue
possible grâce à l'intégration des technologies de l'information et de
la communication (TIC) dans pratiquement toutes les sphères de
l'activité humaine, rend les individus, les organisations et les pays de
plus en plus dépendants des infrastructures de réseau à l'échelle
mondiale. Malheureusement, cette dépendance de plus en plus grande
vis-à-vis des infrastructures d'information et de communication
s'accompagne d'utilisations abusives toujours plus nombreuses et plus
sophistiquées des TIC, à des fins malveillantes ou criminelles. Les
utilisations prennent diverses formes: attaques directes
d'infrastructures publiques, usurpation d'identité, fraudes financières,
intrusions dans la vie privée, ou bien encore attaques par des virus,
spam ou pédophilie en ligne. Les choix d'autrui en matière de
cybersécurité nous affectent tous. Par exemple, la majorité des
courriers électroniques non sollicités sont aujourd'hui envoyés sur des
centaines de milliers d'ordinateurs domestiques dont se sont emparés des
spammeurs. Par conséquent, les maillons les plus faibles du réseau
Internet mondial risquent de porter atteinte à l'ensemble de
l'infrastructure mondiale des TIC.
2. Ce problème s'aggrave: les cybermenaces s'intensifient
Le problème de la cybersécurité revêt de plus en plus d'importance
pour les différents pays et les différentes parties prenantes dans le
monde et ce pour plusieurs raisons, notamment:
- L'architecture héritée de l'Internet: au début
l'Internet était un réseau fermé avec un nombre limité
d'utilisateurs à qui l'on fait confiance, si bien que la
question de l'authentification ne se posait pas. La philosophie
qui, au départ, a présidé à la conception de l'Internet a
aujourd'hui plusieurs "générations" de retard au vu des derniers
enjeux technologiques (prenons par exemple le problème de
l'architecture héritée de l'Internet révélé par le bug du
millénaire). La question maintenant est de savoir comment
remplacer ou modifier cette architecture pour en faire une
infrastructure de l'information et de la communication moderne,
sûre et sécurisée.
- L'anonymat en ligne: étant donné qu'il n'y a pas
d'authentification de l'utilisateur sur Internet, il est facile
de rester anonyme et/ou de falsifier les informations sur son
identité afin d'agir sans crainte de représailles (à l'inverse,
l'anonymat peut être un moyen qui permet aux utilisateurs de se
sentir mieux protégés puisqu'ils ne divulguent pas
d'informations personnelles et se protègent ainsi contre toute
intrusion dans leur vie privée).
- La dépendance croissante de la société vis-à-vis des TIC:
la vie moderne nous rend de plus en plus dépendants des TIC au
travail comme à la maison, qu'il s'agisse du stockage, du
traitement ou de la transmission des données électroniques pour
les comptes bancaires, les actifs financiers ou les dossiers
médicaux. Dans certains pays, l'Internet est tellement
omniprésent dans la société qu'il est souvent difficile
d'imaginer comment l'individu fonctionnait lorsque ce réseau
n'existait pas. L'absence de connectivité, de données ou
d'informations et/ou le fait de ne pas pouvoir communiquer
peuvent avoir des conséquences économiques et sociales
importantes. Très peu d'organisations ont les moyens de prévenir
les incidents, de réagir et de revenir à une situation normale.
3. Problèmes de portée mondiale posés par la cybersécurité
Les problèmes actuels qui ont été choisis ci-après illustrent la
nécessité d'une collaboration étroite entre toutes les parties prenantes
(ce choix n'est pas exhaustif).
3.1 Failles des cadres juridiques actuels
Les cybercriminels exploitent de plus en plus les vulnérabilités et
les failles des législations nationales et régionales. Tout porte à
croire que certains d'entre eux sévissent à présent dans des pays où il
n'y a pas encore de législation appropriée avec voies d'exécution et
qu'ils n'hésitent pas à lancer, depuis ces pays, des attaques contre des
pays où l'utilisation malveillante des TIC est un délit.
Toute législation nationale, pour ainsi dire, est conçue pour
s'appliquer à l'intérieur d'une juridiction bien définie, qu'elle soit
nationale, sous-régionale ou régionale. Mais cela ne permet pas
d'apporter une solution globale aux problèmes juridiques auxquels nous
sommes confrontés et qui sont aujourd'hui de nature planétaire.
Certaines lois actuellement en vigueur peuvent même déplacer le problème
de l'application d'un pays à un autre car dans la société de
l'information sans frontières qui est la nôtre les cybercriminels
peuvent agir sur de multiples territoires et juridictions. Toute
solution aux problèmes posés par les réseaux mondiaux comme le réseau
Internet doit, pour être efficace, être planétaire. Il faut donc mettre
en place un cadre juridique mondial qui constituera une base solide à
partir de laquelle on pourra lutter contre l'utilisation malveillante
des TIC et garantir que les lois sont bien respectées.
3.2 Absence de structures organisationnelles appropriées
Dans de nombreux pays, l'absence de structures institutionnelles
nationales permettant de réagir aux incidents constitue un problème
majeur dans la lutte contre les attaques dans le cyberespace. Des
structures de veille, d'alerte et de réaction à de tels incidents ont
été mises en place aux niveaux national et régional et des mécanismes
ont été définis pour coordonner les mesures de réaction et minimiser
l'incidence des cyberattaques sur les utilisateurs.
Ces cyberattaques ne se limitent pas à une région ou un pays
particulier car les virus, les vers informatiques et autres logiciels
malveillants peuvent se diffuser rapidement par courrier électronique,
et toucher des utilisateurs n'importe où dans le monde. Une coordination
rapide et étroite entre organismes responsables est donc indispensable
aux niveaux national, régional et mondial afin de réagir rapidement et
de limiter les effets dévastateurs des cyberattaques. A cet égard,
certaines initiatives ont déjà été prises pour améliorer la
communication entre les structures organisationnelles aux niveaux
national et régional et ainsi coordonner les mesures de crise mais
beaucoup reste encore à faire.
3.3 Nécessité de solutions planétaires
Les réseaux d'information étant aujourd'hui interconnectés à
l'échelle mondiale, force est de constater - et ce constat est
douloureux - que des pays ou même des groupes de pays industrialisés ne
peuvent à eux seuls apporter une solution efficace aux problèmes de
cybersécurité.
Les cybercriminels ne sont pas enfermés à l'intérieur des frontières
géographiques et les pays ne peuvent fermer leurs frontières aux
cybermenaces. En d'autres termes, le temps et le lieu ne sont plus des
obstacles pour le lancement des cyberattaques, pas plus que
l'emplacement des victimes potentielles. Les tentatives qui ont été
faites pour résoudre ces problèmes aux niveaux national ou régional se
sont révélées être à ce jour insuffisantes.
Au niveau international, il faut renforcer la coordination et
resserrer les liens entre toutes les parties prenantes. Compte tenu de
l'urgence qu'il y a à régler les problèmes de cybersécurité, il faut
prendre des mesures simples et pragmatiques encourageant la coopération
internationale et dans le même temps renforcer les capacités pour mettre
en place une cybersécurité basée sur les expériences nationales et
tenant compte des besoins propres de chaque pays. Il faut un dialogue
inclusif auquel participent toutes les parties prenantes et toutes les
organisations internationales qui ont un rôle à jouer et des compétences
dans le domaine de la cybersécurité. Une culture mondiale de la sécurité
doit être inventée et il faut instaurer la confiance entre les parties
prenantes pour qu'un jour notre monde soit un monde plus sûr.
4. Un dialogue politique sur les stratégies nationales,
régionales et internationales
Les documents issus des deux phases du Sommet mondial sur la société
de l'information (SMSI) soulignent que l'instauration de la confiance et
de la sécurité dans l'utilisation de TIC est un pilier nécessaire de
l'édification d'une société mondiale de l'information. Par ses activités
dans les domaines de la normalisation, des radiocommunications et de
l'élaboration de politiques et de stratégies de développement, l'UIT a
depuis longtemps fait ses preuves en ce qui concerne l'amélioration de
la sécurité des réseaux et services de télécommunication/TIC. C'est
pourquoi le SMSI lui a confié un rôle majeur pour la coordination de la
grande orientation C5 du SMSI: Instaurer la confiance et la sécurité
dans l'utilisation des TIC.
Le Segment de haut niveau du Conseil constitue une instance au sein
de laquelle les hauts fonctionnaires pourront prononcer des déclarations
de politique générale et faire part de leurs perspectives en matière de
cybersécurité, de spam et de lutte contre la cybercriminalité. Une liste
non exhaustive de ces questions est présentée ci-après, l'objectif étant
de faciliter les débats dans le cadre de cette instance du Conseil:
4.1 Questions qui pourraient être examinées
- Quelles sont les plus grandes menaces dans le cyberespace
auxquelles votre pays est aujourd'hui confronté?
- Quels sont les principaux éléments à prendre en compte dans
la formulation d'une stratégie nationale en matière de cybersécurité et de lutte contre la cybercriminalité?
- Quel rôle devraient jouer les gouvernements dans la
promotion d'une culture de la cybersécurité aux niveaux
national, régional et international?
- Quelles sont, selon le gouvernement de votre pays, les
activités prioritaires pour lutter contre les cybermenaces
actuelles et futures aux niveaux national, régional et
international?
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