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GSMA |
Le téléphone mobile, vecteur d’une connexion universelle
Un marché en pleine expansion
A
l’horizon 2015, plus de cinq milliards d’individus devraient avoir accès à des
services de téléphonie et de données et à l’Internet grâce à leur téléphone
mobile. Un rapport publié en octobre dernier par la GSM Association
(GSMA), partenaire de l’initiative Connecter le monde
de l’UIT, indique que le coût des réseaux et des dispositifs mobiles va
continuer de baisser, ce qui mettra les services mobiles à la portée des
personnes à très faible revenu. Ce rapport prévoit qu’environ 80% des nouveaux
abonnés seront des habitants de pays en développement, essentiellement
d’Afrique, de la région Asie-Pacifique et de la région Amériques. Selon les
estimations, le marché du mobile rapporte chaque année environ 700 milliards USD
et enregistre une croissance de 10% par an.
On observe dans de nombreux pays en développement une forte
corrélation entre, d’une part, la pénétration de la téléphonie mobile et,
d’autre part, la croissance économique et les avantages sociaux. Pour faciliter
la réalisation de l’accès universel, la GSMA, dans son rapport, encourage les
gouvernements et d’autres parties prenantes à baisser les taxes spécifiques que
doivent acquitter les abonnés mobiles et à lever les obstacles réglementaires.
Elle fait observer que, en supprimant les droits de douane et les taxes sur les
ventes auxquels sont assujettis les téléphones et services mobiles, on pourrait,
par exemple, stimuler la pénétration du mobile dans les zones déjà desservies
par le réseau et la porter à 20%.
Figure 1 — Couverture mondiale des réseaux mobiles et taux de
pénétration
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Source: Rapport de l’association GSMA: «Accès universel — Comment le mobile
peut mettre les communications à la portée de tous» |
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Aujourd’hui, selon la GSMA, plus de 80% de la population
mondiale est desservie par au moins un réseau mobile, soit deux fois plus qu’en
l’an 2000 (voir la figure 1 à la page 24).
Dans les pays en développement, la téléphonie mobile a totalement éclipsé la
téléphonie fixe. Les opérateurs mobiles ont en effet su répondre à la demande de
services téléphoniques de base plus rapidement et avec plus de souplesse que les
opérateurs de lignes fixes «éliminant un grand nombre des obstacles qui
empêchaient les personnes à revenu modeste de s’abonner et d’utiliser les
services de communications». Au nombre de ces obstacles figuraient les listes
d’attente très longues, les vérifications de solvabilité ou bien encore les
droits d’installation.
L’accès aux services mobiles dans les zones rurales — via des
téléphones publics, des téléphones de village gérés par les «dames du téléphone»
ou des points de revente de cartes téléphoniques sous franchise — est en plein
essor sur les marchés des pays en développement. Au nombre des services offerts
peuvent figurer: les paiements électroniques simplifiés, les appels en PCV ou
bien encore des applications basées sur le service de messages courts (SMS). Le
fait de pouvoir effectuer des opérations bancaires via le réseau mobile permet à
des millions de personnes d’avoir accès, pour la première fois, à des services
financiers. Aux Philippines, par exemple, des Philippins travaillant à
l’étranger peuvent envoyer de l’argent à leurs proches restés au pays. Le
secteur agricole est aidé lui aussi. La bourse des marchandises agricoles du
Kenya informe en temps réel les agriculteurs des prix pratiqués sur le marché
tout comme le «système d’information sur le marché du bétail FOODNET» en
Ouganda. D’autres services destinés au secteur agricole et au secteur des
pêcheries sont fournis au Sénégal et en République sudafricaine.
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Figure 2 — Modèle à trois différentiels
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Source: Rapport de l’association GSMA:
«Accès universel — Comment le mobile peut mettre les communications à la portée
de tous» |
Le «modèle à trois différentiels»
Dans son rapport, la GSMA demande aux gouvernements de
«continuer d’encourager les entreprises du secteur à fournir des solutions
commerciales qui permettront de réaliser l’accès universel et d’atteindre les
objectifs de service de façon durable». Elle préconise également une
intervention de l’Etat uniquement lorsque le seul jeu des forces du marché n’a
pas donné de résultats satisfaisants. Un modèle à trois différentiels est
défini. Il permettra de décider lorsque cette intervention est nécessaire et de
mettre en place des stratégies d’accès universel fructueuses. Une distinction
est faite entre «différentiel d’efficacité du marché» et «différentiel d’accès
effectif» (voir la figure 2).
Le «différentiel d’efficacité du marché»
Il s’agit de la différence entre les biens et les services
fournis effectivement par un marché dans les conditions prévalentes du moment et
les biens et les services que ce marché pourrait offrir. Selon les auteurs du
rapport, ce différentiel peut être surmonté si «le régulateur supprime les
obstacles et crée des conditions équitables pour tous les acteurs sur le
marché». Le tout est de savoir jusqu’où et à quel rythme la commercialisation
peut effectivement se réaliser sur le marché et comment mettre en œuvre au mieux
des mesures propices au marché. Plusieurs options sont possibles: instauration
de marchés ouverts et compétitifs, harmonisation du spectre, réglementation
minimale des tarifs, mise en place de procédures permettant de régler les
différends en matière d’interconnexion, application de taxes de terminaison
asymétriques selon la zone géographique, baisse des taxes perçues, adoption de
systèmes selon lesquels les taxes sont à la charge de l’appelant, octroi de
licences basé sur les coûts et perception de redevances pour l’utilisation du
spectre.
Le «mécanisme des subventions ciblées»
Il concerne essentiellement des zones rurales, des groupes de
population ou des types de services que le seul jeu des forces du marché risque
encore pendant quelque temps de pénaliser mais qui deviendront commercialement
viables après avoir bénéficié d’une première subvention. Des interventions
financières ciblées allant au-delà des mesures réglementaires classiques (par
exemple fonds de service universel) peuvent en effet stimuler ou accélérer la
fourniture de services.
Cette subvention initiale est donc destinée à «donner un coup
de pouce» à un projet ou à un service, l’objectif étant de le rendre, à terme,
commercialement viable. Toutefois, selon le rapport, «la zone bénéficiant de
subventions ciblées se contracte sur la plupart des marchés au fur et à mesure
que les opérateurs mobiles parviennent à desservir, au terme d’une expansion
commerciale normale, de nouvelles zones où l’on pensait que le recours à des
subventions était inévitable».
Le «différentiel d’accès effectif»
Ce terme s’applique aux zones ou aux groupes de population
qui ne seront pas desservis même si le marché fonctionne le plus efficacement
possible et si la libéralisation est optimale. Un soutien financier est alors
nécessaire et il faut mobiliser des investissements supplémentaires: les
pouvoirs publics doivent intervenir, proposer des subventions ou d’autres
incitations susceptibles d’encourager les fournisseurs de services à opérer dans
ces zones et à offrir des services à un prix abordable. Selon le rapport, ce
déficit d’accès touche, en général, 2 à 5% de la population d’un pays ou 20 à
30% de son territoire.
Fonds de service universel
Pour élargir l’accès aux télécommunications, les pouvoirs
publics de plusieurs pays en développement ont mis en place des fonds de service
universel. Au début, les ressources de ces fonds étaient utilisées
essentiellement pour subventionner l’expansion du réseau fixe dans des zones
éloignées et coûteuses à desservir; c’était du moins le cas avant que les
réseaux mobiles n’offrent à ces régions des solutions commerciales à faible
coût.
Dans son rapport, la GSMA examine comment les fonds de
service universel permettent aux pays d’atteindre leurs objectifs de
connectivité et quel rôle les communications mobiles jouent dans la fourniture
du service et de l’accès universels. L’étude réalisée a porté sur 92 pays en
développement dont 32 ont mis en place des fonds de service universel (et
57 envisagent de le faire). Ces fonds sont alimentés par les contributions
perçues auprès d’opérateurs de réseaux fixes ou mobiles, contributions qui,
généralement, représentent 1 à 2% de leurs revenus bruts ou nets. Dans certains
pays toutefois, elles atteignent 5%.
Selon le rapport, 15 des 32 pays ayant mis en place des fonds de service universel ont recueilli plus de six milliards
USD au total auprès des entreprises du secteur, dont 2,1 milliards auprès
d’opérateurs mobiles. Toutefois, 1,6 milliard seulement USD (soit 26%) ont été
redistribués pour soutenir l’expansion du réseau. Les 4,4 milliards restants
(soit 73%) n’ont pas été affectés et ne sont pas dépensés.
C’est l’Amérique latine qui a la plus grande expérience de ce
type de financement. Des fonds ont en effet été mis en place et des enchères à
subventions minimales ont été organisées en Bolivie, au Chili, en Colombie, à El
Salvador, au Guatemala, au Nicaragua et au Pérou. Dans la quasi-totalité des
cas, les fonds opérationnels ont servi à financer des services de publiphones
sur lignes fixes, même si désormais l’expansion des réseaux mobiles devrait être
incluse dans plusieurs programmes.
Dans son rapport, la GSMA indique que les fonds de service
universel qui ont été utilisés n’ont pas permis d’améliorer sensiblement
l’expansion du marché mobile ou le taux de pénétration, exception faite de
l’Ouganda (voir l’encadré) et de la Colombie, essentiellement parce que 93% des
1,6 milliard USD qui ont été dépensés l’ont été pour développer les réseaux de
lignes fixes qui sont relativement coûteux.
Forces du marché et action des pouvoirs publics
Selon le rapport de l’association GSMA, les pouvoirs publics devraient
considérer que les forces du marché sont le principal moyen dont ils disposent
pour élargir l’accès. Les fonds de service universel ne devraient être qu’une
solution de «dernier recours» pour fournir l’accès aux télécommunications dans
des zones très isolées ou très coûteuses à desservir, car il n’est pas
commercialement viable d’y construire des réseaux. Etant appelés à disparaître
progressivement, ils ne devraient donc constituer qu’un outil de politique à
court ou à moyen terme. Dans l’intervalle, ces fonds de service universel
devraient, selon les auteurs du rapport, faire l’objet, au moins tous les trois
ans, d’un examen stratégique tant au niveau de la politique que de la gestion.
En Ouganda, l’un des pays examinés sur lequel
portait l’étude réalisée par la GSMA, l’établissement d’un fonds de service
universel a eu une incidence considérable sur le secteur mobile. La politique
d’accès universel coordonnée menée par le pays et le fonds de service universel
ont en effet permis d’offrir des services de téléphonie et de données sur
l’ensemble du territoire. Avec 96% de la population du pays desservie par des
réseaux mobiles, la Commission des communications de l’Ouganda (UCC) a prouvé
qu’une stratégie d’enchères peut stimuler l’expansion du réseau.
L’UCC a rendu publique une étude qui indique
les services de communication dont ont besoin les zones rurales où vit 88% de la
population. Il a été demandé aux deux principaux opérateurs d’indiquer les
districts ruraux qu’ils pourraient desservir et de renoncer à leurs droits
d’exclusivité dans les zones qu’ils n’avaient pas l’intention de desservir. Près
de 154 districts ont ainsi été identifiés et les enchères à subventions
minimales ont été remportées en 2005 et 2006 par MTN Uganda. En plus des
services qu’elle offre habituellement, MTN a également mis en place plus de
4 000 téléphones de village à accès partagé dans des zones auparavant non
desservies.
Plusieurs raisons expliquent pourquoi la
téléphonie mobile a pu favoriser la mise en place de l’accès universel en
Ouganda, notamment:
-
l’ouverture à la concurrence, avec
l’octroi de licences technologiquement neutres en 1998, avant la
privatisation des opérateurs en place;
-
la présence d’un régulateur indépendant
suscitant la confiance, ce qui a créé un environnement concurrentiel stable;
-
la totalité des ressources du fonds de
service universel ont été allouées aux communications mobiles;
-
les ressources du fonds ont été
essentiellement utilisées pour desservir les dernières zones qui ne
l’étaient pas encore, ce qui a stimulé l’accès aux communications de données
dans l’ensemble du pays;
-
l’obligation faite aux opérateurs
d’indiquer les zones qu’ils ne desserviraient pas, ce qui a permis aux
pouvoirs publics de lancer ensuite des appels d’offres pour la desserte de
ces zones grâce à des subventions provenant du fonds de service universel.
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