Qui a découvert la radio?
Comment savons-nous que l’électricité, le
magnétisme et la lumière font tous partie du spectre électromagnétique et
peuvent être considérés comme se propageant sous forme d’ondes?
Nous devons ce savoir principalement aux travaux de scientifiques du
XIXe siècle, dont les découvertes ont conduit à l’invention des postes de radio
d’aujourd’hui.
1831: une année féconde
Dans des travaux qu’il publie en 1802, Gian Domenico
Romagnosi est le premier à formuler l’idée que l’électricité et le magnétisme
sont liés. En 1820, Hans Christian Ørsted découvre qu’un fil électrique traversé
par un courant électrique crée un champ magnétique. Dans les années 1830, le
savant américain Joseph Henry fabrique des électroaimants en enroulant une
bobine de fil autour de noyaux en fer et se livre à des expériences en vue
d’utiliser l’électricité pour induire à distance des champs magnétiques. Il mène
ses travaux à peu près à la même époque que Michael Faraday
(1791–1867), le savant britannique qui a décrit le phénomène d’induction
électromagnétique en 1831.
David Edward Hughes a-t-il reçu,
au moyen de la radio, le premier appel téléphonique mobile au monde? |
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Il y a induction lorsqu’un champ électrique est produit par
un champ magnétique variable, ou inversement. Faraday constate en outre que le
magnétisme peut avoir un effet sur les rayons lumineux, démontrant ainsi la
relation entre les deux phénomènes. Chose importante: il émet l’idée que les
forces électromagnétiques se propagent linéairement depuis des corps chargés
dans leur environnement — une notion essentielle qui donnera naissance à la
radio. L’année même où Faraday formule sa loi de l’induction naît un physicien
écossais, James Clerk Maxwell (1831–1879), qui en fait la synthèse sous la forme
d’une série de lois mathématiques sur l’électromagnétisme.
Albert Einstein qualifie les travaux de Maxwell comme étant
«les plus marquants et les plus féconds qui aient été menés dans le domaine de
la physique depuis Newton». En 1864, Maxwell synthétise la loi de Faraday dans
un modèle global, connu sous le nom d’équations de Maxwell. Celles-ci postulent
que les champs électriques et magnétiques se déplacent dans l’espace à la
vitesse de la lumière sous la forme d’ondes. Maxwell en conclut que la lumière
est bien une onde électromagnétique et avance l’idée qu’il doit aussi exister
d’autres types de phénomènes à des longueurs d’ondes différentes. En d’autres
termes, il entrevoit l’existence de la radio.
Mais qui donc, en réalité, a observé pour la première fois
des ondes radioélectriques? Un certain nombre de chercheurs ont observé un
phénomène «de transmission d’électricité à distance», dont Thomas Alva Edison
qui, en 1875, affirme avoir découvert une «force étherique» en effectuant des
travaux sur la télégraphie. Mais pour répondre à la question posée dans notre
précédent numéro à la Page des pionniers, c’est un autre savant, né en
Grande-Bretagne en 1831, David Edward Hughes, qui est le premier à rapporter
avoir émis et reçu un signal radioélectrique.
Microphone et «téléphone mobile»
Hughes (1831–1900) était surtout connu pour ses inventions en
télégraphie (voir la
Page des pionniers de juillet/août 2007). En 1876,
année de l’invention du téléphone, Hughes commence à procéder à des expériences,
comme beaucoup d’autres, pour améliorer la transmission du son. Son système,
constitué d’un cylindre contenant deux tiges de charbon à contact lâche,
comporte un circuit électrique avec batterie. L’exposition du cylindre aux
vibrations sonores fait varier la résistance électrique proportionnellement aux
ondes sonores. En 1878, Hughes annonce son invention, qu’il baptise
«microphone».
Poursuivant ses recherches, Hughes découvre que les cylindres
à charbon sont également sensibles «aux impulsions électriques soudaines». Pour
vérifier la distance à laquelle cet effet peut se faire sentir, Hughes met en
place chez lui une source d’étincelles électriques régulières, puis sort dans la
rue en emportant avec lui un cylindre raccordé à une batterie et un téléphone.
Il constate que, à mesure que les étincelles se produisent, il peut entendre les
crépitements correspondants dans le téléphone jusqu’à une distance de 500 yards
(457 mètres). Hughes n’entendait pas un signal modulé — encore moins des mots —,
mais, d’une certaine façon, il recevait en 1878 le premier appel téléphonique
mobile au monde.
Hughes formule l’hypothèse que cette transmission sans fil de
signaux dans la gamme des super basses fréquences s’effectue au moyen d’«ondes
électriques» capables de traverser des bâtiments et de se propager dans
l’espace. Il présente ses résultats à la Royal Society en 1880, mais celle-ci
considère que c’est l’induction, et non pas l’électricité, qui agit à distance.
Ses travaux sont finalement reconnus bien des années plus tard, après qu’un
cadre expérimental rigoureux eût été défini par le savant allemand Heinrich
Rudolf Hertz (1857–1894) pour la radio.
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Les travaux d’Heinrich Rudolf Hertz ont
abouti à l’élaboration d’un cadre expérimental pour la radio |
Action à distance
Hertz valide la théorie de Maxwell en démontrant
expérimentalement l’existence des ondes électromagnétiques. Il confirme que la
lumière est une forme de rayonnement et, à l’aide d’un émetteur à étincelles,
produit en 1888 des ondes décimétriques (UHF) de l’ordre de 100 MHz dans la
bande des ondes courtes. Il découvre également que les ondes radioélectriques
peuvent être transmises au moyen de divers matériaux, ou être stoppées par
ceux-ci, et qu’elles peuvent être focalisées au moyen de réflecteurs
paraboliques. «L’action à distance est démontrée pour la première fois», écrit
Hertz dans l’édition anglaise de ses travaux (1893), publiés en allemand en
1891, et ajoute: «Les forces électriques peuvent s’affranchir des corps
matériels, et subsister comme conditions ou variations dans l’état de l’espace».
Hertz a laissé son nom à l’unité de mesure des fréquences radioélectriques
utilisée aujourd’hui, à savoir le Hertz (Hz). Mais malgré le triomphe de ses
travaux de recherche, ce savant n’avait envisagé aucune application utile de ses
expériences. Il a disparu prématurément à l’âge de 37 ans, à peu près à l’époque
où des personnalités comme Tesla, Popov et Marconi commençaient leurs travaux,
qui ont conduit aux systèmes radioélectriques d’aujourd’hui — plus d’une
décennie après les premières observations de Hughes.
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Question pour notre prochain numéro
«Qui a introduit le silicium dans la Silicon Valley?» |
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