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Protéger les enfants dans le cyberespace
L’internet est un outil de diffusion de l’information de nature neutre
qui peut être utilisé pour faire le bien ou faire le mal. C’est ainsi qu’il
offre un énorme potentiel pour l’éducation de personnes de tous âges et de tous
niveaux, tout en pouvant servir à tendre des pièges en ligne pour exploiter les
internautes à des fins criminelles. Les enfants sont les plus vulnérables à ce
genre de pièges.
Débat au SMSI
Le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) a débattu de la
meilleure manière de protéger les enfants des prédateurs en ligne tout en
encourageant les jeunes à utiliser de manière constructive les technologies de
l’information et de la communication (TIC). Dans la Déclaration de principes et
le Plan d’action de Genève, approuvés par les dirigeants du monde entier en
décembre 2003, «tous les acteurs de la société de l’information» sont instamment
invités à prendre les mesures appropriées, notamment préventives, pour empêcher
que les TIC ne soient utilisées pour une quelconque forme de maltraitance des
enfants. Ce principe a été repris dans l’Engagement et l’Agenda de Tunis qui ont
été adoptés à l’issue de la deuxième phase du SMSI en novembre 2005 (voir
l’encadré).
De nouveaux types de risque se multiplient dans le cyberespace avec
l’apparition de nouveaux systèmes, tels que l’accès internet mobile, le partage
P2P des fichiers, la messagerie instantanée, le dialogue chat en direct, les
jeux interactifs à joueurs multiples et les caméras web. L’effet sur les enfants
a été souligné lors d’une réunion organisée au cours du SMSI à Tunis par
l’Association «End Child Prostitution, Child Pornography, and Trafficking of
Children for Sexual Purposes» (ECPAT), qui a son siège en Thaïlande, et par le
Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). A cette occasion, l’ECPAT a
présenté son nouveau rapport «La violence contre les enfants dans le
cyberespace» qui s’inscrit dans le cadre d’une étude sur la violence contre les
enfants élaborée sous les auspices de l’ONU. Comme Paulo Pinheiro, coordonnateur
de cette étude, le fait valoir dans l’introduction à son rapport, «La communauté
mondiale n’a pas l’excuse de dire que ‹nous ignorions› ou bien que ‹nous ne
pouvions pas prévoir› l’augmentation exponentielle de la violence causée aux
enfants par les nouvelles technologies de l’information et de la communication.»
«La communauté mondiale n’a pas l’excuse de dire que ‹nous ignorions› ou que
‹nous ne pouvions pas prévoir›
l’augmentation exponentielle de la violence
causée aux enfants par les nouvelles technologies de l’information et de la
communication.»
Paulo Pinheiro, coordonnateur d’une étude de l’ONU
sur la violence contre les enfants
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Les parents doivent suivre avec vigilance ce que leurs enfants trouvent sur
l’internet |
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L’Engagement et l’Agenda de Tunis pour la société de l’information
reconnaissent que les enfants et les jeunes ont des besoins particuliers et
qu’il faut les protéger dans le cyberespace.
L’Engagement de Tunis
«Nous reconnaissons le rôle des TIC dans la protection
et le développement des enfants. Nous renforcerons les mesures destinées à
protéger les enfants contre tout abus et à assurer la défense de leurs droits
dans le contexte des TIC. A cet égard, nous insistons sur le fait que l’intérêt
supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.» (Paragraphe 24.)
L’Agenda de Tunis
«Nous réaffirmons l’engagement que nous avons pris de
fournir à tous un accès équitable à l’information et au savoir, en reconnaissant
le rôle joué par les TIC dans la croissance économique et le développement. Nous
sommes résolus à collaborer... pour atteindre les buts et objectifs de
développement arrêtés à l’échelle internationale, notamment les Objectifs du
Millénaire pour le développement, en... intégrant dans les Plans d’action
nationaux et les cyberstratégies nationales des politiques et des cadres de
réglementation, d’autoréglementation ou autres, pour protéger les
enfants et les jeunes contre toute forme d’abus ou d’exploitation
reposant sur l’utilisation des TIC.» (Paragraphe 90 q.)
«Nous encourageons les pays et toutes les autres parties concernées à mettre
en place des lignes téléphoniques d’assistance aux enfants, en tenant compte de
la nécessité de mobiliser les ressources adéquates. Il faudrait réserver à cet
effet des numéros faciles à mémoriser et utilisables gratuitement à partir de
tout type de téléphone.» (Paragraphe 92.)
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Un commerce de la maltraitance en expansion
Les participants à la réunion du SMSI se sont déclarés de plus en plus
préoccupés par la facilité avec laquelle ceux qui se livrent à la maltraitance
des enfants passent du monde physique au monde virtuel. On estime à plus d’un
million les enfants qui sont exploités tous les ans dans le cadre d’un commerce
du sexe mené à l’échelle planétaire dont la valeur, selon les estimations,
atteint 20 milliards USD. Parallèlement, a-t-on souligné, la maltraitance des
enfants dans le monde virtuel s’est transformée en une entreprise lucrative.
D’après l’EPCAT, les agressions contre les enfants au moyen des nouvelles
technologies «prolifèrent et provoquent des dommages physiques et psychologiques
profonds et durables». Ces agressions prennent diverses formes: pornographie
infantile et sévices sexuels «en direct» en ligne destinés à des clients
payants, incitation sexuelle, harcèlement et intimidation en ligne et accès à
des documents illicites et dangereux. Les malfaiteurs utilisent également le
cyberespace pour organiser les voyages touristiques de pédophiles et le trafic
d’enfants.
L’attention a surtout porté sur les rencontres chat considérées comme le lieu
de prédilection des prédateurs sexuels à la recherche de jeunes susceptibles
d’être «préparés» en vue de sévices à venir, mais les enfants optent désormais
de plus en plus pour la messagerie instantanée et les réseaux homologues qu’il
est encore plus difficile de surveiller. Ces techniques de partage de fichiers
deviennent également un des principaux outils utilisés par ceux qui font commerce d’images sexuelles. Ce qui a été dit à la réunion c’est que l’étendue et
le caractère évolutif des agressions en ligne contre les enfants dépassent la
capacité de réaction actuelle des instances chargées de faire respecter la loi
et la capacité qu’a la société de comprendre comment ces techniques peuvent être
employées.
Il faut intervenir davantage
Une plus grande coopération s’impose entre les responsables des politiques et
entre les acteurs du secteur privé. Pour empêcher cette activité criminelle, les
participants à la réunion ont tout particulièrement exhorté les gouvernements,
les éducateurs, les parents et les sociétés internet à collaborer. Un appel a
été lancé aux fournisseurs de services internet et aux fabricants de logiciels
pour qu’ils adoptent des codes de conduite volontaires visant à éviter les abus
et pour que des logiciels peu coûteux soient mis sur le marché comme moyen de
bloquer l’accès à la pornographie à partir des ordinateurs. Selon la plupart des
participants, il y a lieu d’adopter dans de nombreux pays une nouvelle
législation plus stricte pour lutter contre les abus. Les conventions
internationales et les normes professionnelles de portée mondiale sont également
considérées comme un moyen d’une importance cruciale. La Convention sur la
cybercriminalité, dont le Conseil de l’Europe est l’initiateur, constitue
un important point de départ dans la mesure où il s’agit du premier instrument
contraignant qui traite de la maltraitance des enfants dans le cyberespace.
Cette convention est ouverte à tous les pays.
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Accéder à l’internet de n’importe quel endroit peut être amusant mais cela
peut aussi présenter un danger pour les enfants |
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La lutte contre les prédateurs
Divers projets internationaux ont été lancés dans le but d’éradiquer le
mauvais usage de l’internet et d’en encourager le bon usage.
La police est de plus en plus consciente de l’exploitation en ligne que
subissent les enfants. Un exemple de coopération internationale dans ce domaine
est donné par la création en 2003 du Groupe de travail virtuel international au
sein duquel Interpol et les organismes de police d’Australie, du Canada, des
Etats-Unis et du Royaume-Uni ont joint leurs efforts. Ce Groupe de travail s’est
vu décerner un prix en 2006 par l’Association des fournisseurs de services
internet du Royaume-Uni en reconnaissance des efforts qu’il déploie afin que le
cyberespace devienne plus sûr pour les enfants.
Parallèlement, des solutions techniques sont également proposées aux parents,
notamment l’utilisation de logiciels de filtrage qui peuvent empêcher l’accès à
certains types de contenu en ligne. Par ailleurs, diverses entités mettent à
disposition des portails internet spécialement conçus et surveillés pour donner
aux enfants un accès sûr à des sites web licites.
Dimdima Kids, (www.dimdima.com), une revue indienne en ligne pour
enfants qui propose également un espace de discussion et fournit des liens vers
de nombreux sites consacrés à l’éducation et au divertissement, constitue un
exemple d’organisme privé actif. Cette revue en ligne dont le nom signifie
«battement de tambour» en Sanskrit, est gérée par une fondation à vocation
éducative, Bharatiya Vidya Bhavan. En Australie, on peut trouver un exemple
d’intervention du secteur public dans le programme NetAlert Cybersafe Schools
mis au point par l’instance consultative nationale pour la sécurité de
l’internet NetAlert (www.netalert.net.au). Cet organisme initie les
élèves du primaire et du secondaire à la fois au potentiel qu’offre l’internet
et aux dangers qu’il présente. Il s’occupe également des jeunes enfants, dans le
cadre du site web «Netty’s World» spécialement conçu à leur intention.
Internet: un moyen d’aider les enfants
Un portail mondial d’un autre type (www.chiworld.org), destiné aux enfants, a
été lancé par Child Helpline International (CHI), organisme à but non lucratif
partenaire de l’initiative Connecter le monde de l’UIT. On y trouve un
réseau mondial de permanences téléphoniques composé de 81 membres dans 71 pays.
Au total, ces permanences reçoivent environ 11 millions d’appels par an. Selon
cet organisme «les permanences téléphoniques sont en mesure de mettre les
enfants en rapport avec des services pouvant leur apporter immédiatement
secours et sécurité; elles leur permettent de trouver au bout du fil une
solution à leur problème et peuvent, le cas échéant, soutenir leurs appels au
moyen d’interventions et des mesures de persuasion directes.»
Lors de la Conférence mondiale de développement des télécommunications qui
s’est tenue à Doha en mars 2006, un accord a été signé par l’UIT,
CHI et le Ministère néerlandais des affaires économiques pour financer ce
portail. Celui-ci fournit une passerelle sûre qui met en rapport les enfants
avec des permanences où ils peuvent obtenir des conseils par courrier
électronique ou qui leur permet d’accéder à des chats sûrs. CHI espère ainsi
établir le contact avec les jeunes qui bien qu’ayant besoin d’aide n’osent pas
passer par une permanence téléphonique. Ce segment d’utilisateurs est en
augmentation et des milliers de messages électroniques sont reçus tous les ans
dans le monde entier.
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