COMMUNICATIONS HERTZIENNES
Contrôler les émissions de rayonnements pour protéger la santé
Par Luiz Carlos Neves et Antonio Marini de Almeida
Avec l’essor exceptionnel de la téléphonie mobile, le public exige davantage
de transparence dans les informations qui lui sont données sur les niveaux de rayonnement
électromagnétique émis par les stations de base des systèmes de communication hertziens.
Les effets à long terme des rayonnements électromagnétiques sur la santé sont toujours
à l’étude. Néanmoins, de nombreuses personnes dans le monde se demandent quel contrôle
s’exerce sur ces émissions.
Pour répondre à ces préoccupations, le Brésil a mis
au point un système qui permet à une municipalité de contrôler les niveaux de rayonnement
émis par les infrastructures de télécommunication et de donner au public accès à
ces informations via l’internet. Ce système fournit également des données objectives
permettant de valider et d’affiner les critères utilisés pour planifier l’expansion
des infrastructures de télécommunication mobile. Le présent article décrit la façon
dont le Brésil applique cette nouvelle méthode de contrôle des émissions de rayonnements
électromagnétiques.
CPqD |
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Station de base de téléphonie mobile dans la ville d’Americana au Brésil |
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L’exemple du Brésil
Les indicateurs de télécommunication pour le Brésil révèlent l’importance actuelle
de la technologie mobile: au cours des cinq dernières années, le nombre de téléphones
mobiles a augmenté de 270%. Selon le rapport Indicators 2006 publié par l’Agence
nationale de régulation des télécommunications du Brésil (Agência Nacional de
Telecomunicações — Anatel), le pays comptait 86 millions d’abonnés au mobile,
contre 42 millions d’abonnés aux lignes fixes en 2005. Cette croissance spectaculaire
va de pair avec l’expansion considérable des infrastructures de téléphonie mobile,
en particulier l’augmentation du nombre de stations de base, d’antennes et de pylônes
installés en zone urbaine. Les prestataires de services s’efforcent d’optimiser
leurs investissements en installant des pylônes sur de petites parcelles ou dans
des zones résidentielles, voire à proximité d’écoles, mais, de plus en plus, la
population locale réagit à ces changements et s’interroge sur l’emplacement des
pylônes radio, leurs incidences sur le paysage et les risques pour la santé.
De nombreuses villes brésiliennes ont établi des règles limitant l’installation
des stations de radiocommunication dans les zones urbaines. En outre, une réglementation
nationale fixe des limites aux émissions électromagnétiques, compte tenu des lignes
directrices établies par la Commission internationale de protection contre les rayonnements
non ionisants. Néanmoins, en l’absence d’équipements permettant de démontrer que
les niveaux de rayonnement n’excèdent pas les limites autorisées à proximité d’un
pylône radio, le nombre d’actions en justice augmente, ce qui complique sensiblement
les projets d’expansion, puisque parallèlement les législations locales font parfois
obstacle aux nouvelles installations.
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Page du site internet du système de contrôle, indiquant des données pour une
station de radiocommunication sur un plan de la ville d’Americana. En cliquant sur
l’icône représentant cette station, on voit apparaître une nouvelle fenêtre avec
des informations sur le nom de la station, son adresse, le nom de son propriétaire
et le type de station |
Pour remédier à cette situation, un projet de recherche-développement a été lancé
en 2004 et financé par le Fonds brésilien pour le développement technologique des
télécommunications (Fundo para o Desenvolvimento Tecnológico das Telecomunicações
— FUNTTEL), sous la direction du Centre de recherche et de développement en
télécommunications (CPqD), afin de trouver le moyen de diffuser des informations
fiables et à jour sur les communications hertziennes.
Imaginer une solution
La situation au Brésil, ainsi que l’expérience d’autres pays, montrent qu’il
faut intensifier les efforts pour informer les habitants des effets de la technologie
et qu’il faut prévoir des procédures pour mieux expliquer et faire comprendre ces
effets, conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé.
L’opinion publique brésilienne n’a pas été suffisamment informée des changements
dans son environnement et, bien souvent, les personnes qui demandaient des renseignements
sur les nouvelles installations n’ont pas reçu de réponse satisfaisante. Parallèlement,
des problèmes d’ordre technique ont empêché les collectivités locales de prouver
que la législation en vigueur était respectée et que le fonctionnement des stations
de radiocommunication existantes était contrôlé efficacement.
La réponse a consisté à créer un système fiable capable de donner au public des
informations exactes et facilement compréhensibles. Dans le cas d’un pays en développement
surtout, les critères suivants devaient être remplis:
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Ce système devait pouvoir être géré par un personnel sans qualification dans
le domaine des télécommunications.
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Il devait être possible d’évaluer la quantité de rayonnements émis par un
groupe d’installations et les modifications qu’entraînerait la création d’une
nouvelle installation avant que sa mise en œuvre ne soit autorisée.
- Les résidents devaient avoir accès au système et aux informations sur le
contrôle des rayonnements, qui devaient être formulées de manière claire et
facilement compréhensible.
- Les technologies employées ne devaient nécessiter qu’un investissement modique
et la maintenance des équipements devait pouvoir être facilement assurée.
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Des icônes signalent sur le plan l’emplacement d’une station de base et d’une
unité de télémesure, ainsi qu’un indicateur des niveaux de rayonnement. Le graphique
couleur à la droite de l’écran indique des fourchettes de pourcentage des valeurs
limites de rayonnement |
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Possibilité de contrôle en ligne
Le système de contrôle qui a été élaboré au Brésil effectue en continu des mesures
et des simulations de l’intensité des rayonnements non ionisants émis par les stations
de base des systèmes de télécommunication hertziens. Les utilisateurs peuvent ainsi
consulter sur l’internet une carte des sources de rayonnement électromagnétique
dans leur ville ou voir des simulations des émissions provenant des nouveaux éléments
du réseau hertzien.
Appelé CPqD NIR Monitoring, ce système, qui dessert divers clients, se
compose d’un serveur internet, d’une base de données, d’un serveur de carte et d’une
interface pour le suivi à distance des unités de contrôle des rayonnements. Les
données relatives aux niveaux de rayonnements sont représentées graphiquement sur
les cartes en pourcentage de la limite de rayonnement autorisée. Les modules logiciels
ont été élaborés à l’aide d’outils à code source ouvert afin de créer un système
ne nécessitant qu’un investissement modique.
Un nouvel équipement a été élaboré, qui permet de mesurer les rayonnements à
distance. Il se compose d’un capteur de champ électromagnétique et d’un module de
contrôle qui réalise des mesures à intervalles réguliers avant de les transmettre
au système via le réseau téléphonique mobile.
Un projet pilote à Americana
Ce système a été expérimenté dans la ville d’Americana, dans l’Etat brésilien
de São Paulo, pour pouvoir être validé et amélioré. Les données techniques et les
informations sur l’emplacement des stations de radiocommunication ont été obtenues
auprès de la municipalité et d’Anatel.
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Luiz Carlos Neves et Antonio Marini de Almeida, CPqD Telecom and IT
Solutions, Centre de recherche et de développement en télécommunications,
Campinas, São
Paulo, Brésil |
Le plan d’Americana a été tiré d’une carte numérique qui inclut aussi des informations
sur les voies ferrées, les routes principales, les places publiques, les quartiers
de la ville et ses principaux sites. Des photographies des stations de base pour
les systèmes de communication mobiles ont également été fournies. Pour chaque station,
le système enregistre le nom et l’adresse de son propriétaire, les coordonnées géographiques,
les caractéristiques techniques des antennes (modèle, gain, hauteur, azimut et inclinaison
mécanique), les fréquences et la puissance de chacun des émetteurs, le nombre de
porteuses et les affaiblissements de transmission. L’efficacité de cette simulation
a été prouvée par des mesures de champ effectuées au niveau de toutes les stations
de base dans la ville d’Americana.
Avec ce système, les habitants peuvent rechercher l’emplacement des installations
existant dans la ville et mesurer les rayonnements émis ainsi que les valeurs simulées
des émissions, en cliquant simplement sur l’emplacement d’une station de base signalé
sur un plan de ville. Ce système est accessible en ligne depuis décembre 2004, via
les sites web des collectivités locales et du CPqD.
Grâce à ce nouveau système, les pouvoirs publics d’Americana exercent aujourd’hui
un contrôle plus efficace sur les stations de radiocommunication installées dans
la ville et les habitants peuvent avoir des informations sur les niveaux de rayonnement.
Ce système contribue pour beaucoup à atténuer les risques de conflit entre les parties,
les organismes chargés de la réglementation et les prestataires de services de communications
mobiles. Americana envisage aujourd’hui de modifier sa législation municipale afin
d’établir des critères régissant l’installation des stations de base.
Le système de contrôle des niveaux de rayonnement élaboré au Brésil prouve manifestement
qu’il est possible d’autoriser l’expansion des technologies d’accès hertzien tout
en donnant aux habitants la possibilité de contrôler les effets secondaires éventuels
de l’utilisation de certaines technologies sur une grande échelle.
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